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Décès Victimes

17.01.2023 – Les réactions s’enchaînent à la suite d’un troisième décès dans un commissariat…

Ce dimanche 15 janvier, les collègues de Sourour ont organisé un rassemblement et invité tous ceux et celles qui appréciaient la victime à venir lui rendre hommage devant le lieu du décès. Plus d’une centaine de personnes sont venues. Vive émotion et profonde incompréhension parmi les proches, qui appellent à rester mobilisé·es pour de prochains évènements, à suivre sur la page FB de l’asbl PAC.

Sarah de Liamchine, présidente de l’association PAC (présence et actions culturelles) où travaillait Sourour :

« C’est un traumatisme important pour le PAC, d’autant que nous sommes souvent mobilisés dans des dossiers liés aux violences et à la police. C’est déjà très compliqué quand il s’agit de cas concernant des inconnus, mais quand il s’agit d’une collègue, c’est un traumatisme. Une cellule d’écoute et d’aide psychologique a été mise en place au sein de l’association. Certains collègues ont, aujourd’hui, peur d’être interpellés par la police, surtout s’ils sont d’origine étrangère. Il faut se poser des questions à ce propos. Ce n’est pas normal que la police suscite la peur alors qu’elle est là pour aider et protéger. Sourour aurait dû être protégée, mais cette mission n’a pas été remplie par la police. C’est le troisième décès d’une personne d’origine maghrébine dans cette cellule. Quand ça arrive une fois, on peut croire à un incident. Quand cela arrive trois fois, ce sont des dysfonctionnements. Sourour n’est pas un simple fait divers, ce n’est pas un cas, c’est une personne. Morte trop tôt. Pour le moment, nous essayons d’être surtout là pour le fils de Sourour, qui n’a plus de parents. C’est un jeune meurtri, mais il reste digne. Ce qu’il souhaite aujourd’hui, c’est comprendre ce qui est arrivé à sa maman. »

L’ambassade de Tunisie à Bruxelles a publié le 17 janvier un communiqué :

« L’ambassade porte à la connaissance des ressortissants tunisiens en Belgique, que tout le nécessaire est entrepris, en coordination avec le Consulat de Tunisie à Bruxelles et les auorités belges, ainsi qu’avec la famille de la défunte, pour connaîter les circonstances exactes de la mort, dans un centre de détention de la police de Bruxelles, d’une ressortissante tunisienne, survenue jeudi 12 janvier 2023. »

Bruno Bauwens, conseiller communal PTB :

Nous exigeons, tant au niveau communal qu’au niveau fédéral, qu’un audit de la part du Comité P soit réalisé pour ce commissariat. La demande est faite au sein du conseil communal, mais elle sera également faite en commission Intérieur de la Chambre, au niveau fédéral. Nous voulons également joindre la Ligue des Droits Humains et l’Institut fédéral des droits humains à cet audit. C’est le troisième décès suspect dans cet établissement policier, c’est inacceptable. Nous voulons que toute la vérité soit entendue à propos de cette mort, et ne pas rester avec des questions sans réponses comme c’est le cas pour les décès précédents. »

Le bourgmestre Philippe Close (PS), interrogé en séance du conseil a indiqué que chaque année 9000 personnes faisant l’objet d’une arrestation administrative ou judiciaire connaissent le même centre de détention de la police locale situé à la « Cité administrative », entre le dispatching de la police fédérale et les locaux de la police de zone. Un audit du commissariat serait souhaitable selon lui. Le bourgmestre a encore précisé qu’à la suite des deux décès précédents, une procédure de passage toutes les heures en journée et toutes les deux heures la nuit a été mise en place au centre de détention.

C’est effectivement la 3ème fois en deux ans qu’on découvre un cadavre dans une cellule du RAC, sous la responsabilité de la police locale bruxelloise :

  • Le 19 janvier 2021, Ilyes Abbedou, sans-papier algérien de 29 ans, est arrêté pour le vol présumé d’une veste. Placé en cellule le soir à la rue Royale, on le retrouve mort le lendemain après-midi. Autopsie : mort plus de 9 heures avant que la police ne le constate officiellement. Quid des caméras de surveillance censées être contrôlées en permanence pour que l’alerte puisse être donnée au moindre souci ? Le médecin légiste affirme qu’aucune trace de violence n’a été décelée et que la mort est intervenue sans intervention d’un tiers. À ce jour, aucune explication.
  • Le 13 décembre 2021, Mohamed Amine Berkane , un autre sans-papier algérien de 26 ans, est arrêté place de la Bourse pour le vol présumé d’un GSM et amené dans le même bâtiment du RAC. Un médecin l’examine avant qu’il soit écroué et délivre un « Vu et soigné ». Mort annoncée le lendemain vers 15:00, après intervention du SMUR. Autopsie : pas d’intervention d’un tiers dans le décès.
  • Le 12 janvier 2023, c’est au tour de Sourour, 46 ans et mère d’un jeune de 19 ans, arrêtée pour « trouble à l’ordre public » et encagée au RAC. Autopsie : pas d’intervention d’un tiers dans le décès. Cause du décès ? Suicide par pull interposé…

Les trois dossiers font toujours l’objet d’enquêtes judiciaires. Jusqu’à la prochaine découverte macabre ? À ObsPol, ce RAC produisait déjà des remugles nauséabonds, aux côtés d’autres commissariats bruxellois de sinistre (et maintes fois vérifiées) réputation. Mais alors que la plupart de ces commissariats ne doivent leur réputation qu’aux coups, insultes et brimades des flics et des geôliers, le RAC a une place plus détestable encore dans nos archives : 3 occurences, 3 morts…

Alors, attendra-t-on le décès suivant pour mener à bien l’ »audit » souhaité par le Bourgmestre ? Ne serait-il pas opportun d’étendre cet « audit » à tous les commissariats bruxellois ?

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Décès

15.11.2021 – Négligence, défaut de prévoyance, non-assistance à personnes en danger sont des infractions pénales !

En octobre 2021, la chambre du conseil du Hainaut (B) a décidé de renvoyer quatre policières devant le tribunal correctionnel pour non-assistance à personne en danger. Cela fait suite au décès de Simon Bachelart, un Français de 26 ans qui avait passé une nuit en détention, le 16 juillet 2016. Cet homme avait été interpellé dans la nuit sur le site du festival de Dour. Il était sous l’emprise de drogue. Emmené en cellule il a fait plusieurs crises qui cependant n’ont pas incité les policières à appeler un médecin ou une ambulance. Il est mort des suites d’une overdose.
En octobre 2021, la chambre du conseil du Hainaut (B) a décidé de renvoyer quatre policières devant le tribunal correctionnel pour non-assistance à personne en danger. Cela fait suite au décès de Simon Bachelart, un Français de 26 ans qui avait passé une nuit en détention, le 16 juillet 2016. Cet homme avait été interpellé dans la nuit sur le site du festival de Dour. Il était sous l’emprise de drogue. Emmené en cellule il a fait plusieurs crises qui cependant n’ont pas incité les policières à appeler un médecin ou une ambulance. Il est mort des suites d’une overdose.
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Décès Justice Victimes

31.10.2021 – Procès Mawda : Verdict reporté en dernière minute, un mépris de plus !

La Cour d’appel de Mons devait rendre son arrêt ce vendredi matin dans le procès Mawda, mais l’audience est finalement reportée au 4 novembre. Le hic ? Les parties civiles n’auraient pas été prévenues, du moins officiellement.
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Décès Victimes

19.08.2020 – Décès d’un passager après une arrestation policière à l’aéroport de Charleroi: l’enquête toujours en cours

Jozef Chovanec est décédé en février 2018 à l’hôpital après plusieurs jours de coma. Selon sa famille, il aurait subi des violences policières lors de son interpellation, le 23 février 2018, sur le tarmac de l’aéroport de Charleroi.

On lui avait refusé l’embarquement dans un avion en direction de Bratislava parce qu’il « se montrait turbulent« . Profondément perturbé par son enfermement après s’être rebellé, les caméras de surveillance le montraient se frappant violemment la tête contre les murs. Il a subi un arrêt cardiaque, sombré dans un coma avant de perdre la vie.

Une enquête avait été ouverte. Les proches de la victime s’étaient constitués partie civile devant un juge d’instruction de Charleroi. Selon Het Laatse Nieuws, la victime aurait subi des violences policières et le comportement de certains des policiers intervenus auprès de la victime poserait problème.

« Sur les photos, on voit une policière mimer un salut hitlérien et d’autres policiers rire. Un des policiers se trouvait appuyé sur la victime pendant plusieurs minutes« , a détaillé Ann Van de Steen, avocate des proches, qui réclame par ailleurs la désignation d’un nouveau juge d’instruction.

Images Police

Deux ans après les faits, les proches de la victime se plaignent de la lenteur des investigations. D’après le parquet, la crise sanitaire du coronavirus a retardé certains devoirs complémentaires. « Les proches de la victime ont sollicité, à deux reprises, des devoirs complémentaires concernant l’audition de plusieurs personnes et une expertise médico-légale. La dernière requête remonte au mois de février dernier. Mais avec la crise du covid-19, il y a eu un retard. Tous les policiers impliqués dans l’intervention policière ont été auditionnés« , dixit le parquet de Charleroi.

Plusieurs interrogations s’imposent à la lecture des faits révélés par la presse :

  • Pour quelle raison un passager, certes remuant mais dont le billet d’avion est dans sa poche, se voit-il emmené par la police et placé seul dans une cellule ? Ceci correspond-il à une démarche normale et réglementaire des forces de l’ordre qui enferment des passagers, même remuants, sans lui permettre d’en informer la famille ? Visiblement sans lui indiquer la durée de sont enfermement ? Sans visite d’un médecin qui pourrait juger de l’état de santé de la personne ?
  • Si une personne se blesse, même de manière volontaire en se frappant la tête contre une porte (ou un mur), la chose évidente à faire ne serait-elle pas de faire appel à un médecin pour vérifier l’état de santé de la personne ? Est-elle sous l’effet de drogues ? Si tel était le cas, cette personne ne devrait-elle pas être emmenée d’urgence à l’hôpital pour vérifier de quoi il s’agit ? Le fait d’être remuant à l’embarquement d’un avion serait donc dans notre pays une raison suffisante de ne pas porter assistance à personne en danger ?
  • Donc cette personne étant blessée doit, d’après les estimations des forces de l’ordre, être entravée, mais pas n’importe comment ! Admettons-qu’ils craignent pour leur personne, à deux, entraver un homme devrait pouvoir se faire sans trop de heurts et dans le respect humain le plus élémentaire. Rappelons que cette personne est blessée, peu importe l’origine de ses blessures. Ici ils s’y mettent à plusieurs, s’acharnent sur une personne en position vulnérable, seule, maîtrisée puisque entravée ; cela ne pose aucun problème à l’ensemble des forces de l’ordre présentes.
  • Est-il réglementaire et prévu que six personnes s’acharnent (nous répétons) sur une personne entravée ? L’une se complaît à considérer le passager blessé comme un matelas pneumatique à vider de son air en s’y appuyant 16 minutes, apprenons-nous. Les « collègues » (ce terme nous est particulièrement problématique lorsqu’utilisé par les forces de police, étant donné l’omerta et la protection qu’elles se permettent entre eux-elles), non seulement n’agissent pas en protégeant la personne blessée entravée dans une position dangereuse, au contraire elles se ruent également vers cet être entre temps recouvert d’une couverture. Il n’est plus un être humains, il est un paquet, une couverture se jette souvent sur les morts…
  • Peu importe pour les policiers, qui poursuivent « l’intervention » en rigolant, c’est si drôle effectivement de se trouver à six autour d’un corps inerte. Tellement drôle qu’on se permet d’agrémenter la scène d’un salut hitlérien… Rappelons ce que ce geste signifie. Il ne s’agit pas d’une farce, il s’agit d’un le salut fasciste exécuté par le bras et la main droite tendus !
  • Heureusement, la hiérarchie veille : la porte-parole de la police fédérale ose en toute quiétude nous tranquilliser en nous informant que la police « a pris connaissance de ces images dans la presse« , (sic, on ne s’étonne plus que l’enquête piétine…). « Bien entendu, une enquête disciplinaire aura lieu en interne pour déterminer ce qui s’est passé. » Mieux vaut tard que jamais ? Et pour nous calmer de façon définitive, deux ans plus tard « cette collègue ne sera plus en service. » Les syndicats nous informent eux qu’il s’agirait d’une « jeune collègue« . C’est vrai que cela fait toute la différence, et nous voilà rassuré.e.s !

Si nous nous permettons ci-dessus de poser et questionner de cette façon c’est parce que nous sommes outrés, dégoûté.e.s, choqué.e..s et plus de ce qui heureusement pour une fois sort dans le sphère publique. Il y eut aussi Jonathan Jacob à Anvers, ne l’oublions pas… Où en est l’enquête ? Que dire de ces agissements incontrôlés, non « enquêtés« , et pourquoi ne seraient-ce que ces « enquêtes » devraient-elles rester  « internes » ? Le fait de torturer serait donc acceptable quand exécuté par les forces de l’ordre ?

L‘article 53 de la Convention de Vienne1 précise :

Est nul tout traité qui, au moment de sa conclusion, est en conflit avec une norme impérative du droit international général […] aucune dérogation n’est permise et elle ne peut être modifiée que par une nouvelle norme du droit international général ayant le même caractère. Ainsi, la conséquence la plus manifeste en est que les États ne peuvent déroger à ce principe par le biais de traités internationaux, de coutumes locales ou spéciales ou même de règles coutumières générales qui n’ont pas la même valeur normative. […] Clairement, la valeur de jus cogens de l’interdiction de la torture rend compte de l’idée que celle-ci est désormais l’une des normes les plus fondamentales de la communauté internationale […]

En outre, il s’agit là d’une valeur absolue que nul ne peut transgresser« , selon Olivier de Schutter (International Human Rights Law. Cases, materials, commentary, 2ème éd., Cambridge, Cambridge University Press, 2014, pp. 71 et s.)

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques précise que l’État a dans le cadre des disposition légales internationales, une obligation positive d’adopter des mesures propres à mettre en œuvre la réalisation du droit garanti par la combinaison des articles 3 et 1er de la Convention européenne des droits de l’Homme. Cette obligation vise à protéger l’intégrité physique des personnes privées de liberté – qu’elles soient placées en rétention administrative, en garde à vue ou détenues en prison, dès lors qu’elles se trouvent en situation de vulnérabilité.

Dans l’affaire Jozef Chovanec , l’État belge a-t-il répondu à ses obligations ?

Le ministre De Crem ne devra pas se contenter de dénoncer « une violence disproportionnée« , il lui faut agir, et vite ! Aux USA, une énorme partie de la population et de la presse se sont offusqués de la mort de George Floyd, l’Europe a suivi, des manifestations importantes et des voix de révolte se sont fait entendre. En sera-t-il de même ici en Belgique face à une situation somme toute fort similaire ?

Sources : Belga, Het Laatse Nieuws, Sudinfo, Metro, La Libre Belgique, RTBF]