13 décembre 2021, Bruxelles
26 ans. Mort en cellule
Mohamed, originaire de la Willaya de Tipaza en Algérie, est arrêté le dimanche 12 décembre au soir dans le quartier de la Bourse, soupçonné d’un vol de GSM. Sa situation de séjour n’est pas en ordre, il est « illégal« . Il est emmené dans les locaux de la police fédérale qui sert également de garde zonale à la rue Royale.
Il était en compagnie de son ami Hicham [le prénom a été modifié], lui aussi embarqué pour les mêmes faits. Hicham est placé dans une cellule pour mineurs alors que Mohamed est placé dans une cellule pour adultes. Ce traitement différencié ne s’explique pas car les deux jeunes garçons avaient quasiment le même âge. Il passe la nuit dans sa cellule et reçoit un petit déjeuner le lendemain matin mais son repas de midi ne lui a pas été délivré car : « On pensait qu’il dormait » justifient les policiers.
À 14:00, les agents commencent à s’inquiéter de le voir inanimé. Des minutes vitales ont déjà été perdues et le seront encore. Quand l’état d’inanition de Mohamed est déclaré, les policiers n’appellent pas directement le SMUR, mais une ambulance. Les secouristes ne réussissent pas à le réanimer et ce sont finalement les services d’urgence et un médecin urgentiste qui arrivent sur place pour constater le décès vers 15:00.
Hicham reconnaît que son ami, son « frère« , était consommateur de stupéfiants et de médicaments. Lors de l’arrestation et de l’incarcération, il aurait été particulièrement agité : « Je l’entendais crier, puis plus rien ! » […] Oui, il se droguait, il buvait, il consommait toutes sortes de substances mais quand ils l’ont arrêté, ils l’ont emmené sur ses deux pieds. » […] Au commissariat, les policiers savent où sont les caméras. Ils nous frappent quand ils savent qu’ils ne seront pas filmés.«
D’après l’enquête de Malika Madi pour Divercité, des zones d’ombre subsistent dans la mort de Mohamed :
- Mohamed, plâtré au bras, était il dans un état d’agitation extrême nécessitant de le maîtriser ?
- Lors de l’arrestation d’un suspect, la législation belge, selon que la personne arrêtée soit majeure ou mineure, diffère. Mohamed, d’après son ami Hicham, avait 26 ans, mais celui-ci affirmait en avoir 17. Est-il vraisemblable que Mohamed reconnaisse avoir 18 ans lors de son arrestation alors qu’il n’ignorait pas la différence que cela pouvait entraîner du point de vue du traitement de son dossier ?
Le « Vu et soigné » en Belgique ou « Certificat de non-admission » en France, est un document qui dégage les officiers de police de toute responsabilité en cas de problème médical dans leurs locaux. Or, Mohamed a été vu par un médecin, selon le communiqué du parquet de Bruxelles, qui l’a estimé physiquement apte à subir une détention, quelques heures encore avant son décès. D’un point de vue légal, seul le médecin peut être incriminé en cas de problème médical pendant la garde à vue. Entre le « vu et soigné » diagnostiqué le dimanche 12 décembre au soir et la mort constatée le lundi 13 en début d’après midi, que s’est-il réellement passé ?
- Les cellules sont équipées de cameras de surveillance permettant un contrôle du détenu pendant toute la durée de sa garde à vue. Si le détenu s’agite, se blesse ou attente à sa vie, le policier le voit immédiatement. Mais tous les policiers agissent-ils rapidement ?
Le parquet de Bruxelles a demandé la saisie des images de vidéosurveillance et a ordonné le passage du labo de la Police Judiciaire Fédérale. Une autopsie du corps a été pratiquée.
- 15.12.2021 – Autopsie
- 14.12.2021 – Saisie des images de surveillance à l’initiative du Parquet de Bruxelles
- 13.12.2021 – Décès de Mohamed Amine
- 2021.12.18_Divercite_Zones.D.Ombre.Sur.Les.Circonstances.Exactes.Du.Deces.De.Mohamed.Amine.Berkane.Dans.Une.Cellule.pdf
- 2021.12.27_Bruxelles.Pantheres_Retour.Sur.L.Assassinat.De.Mohamed.Amine.Berkane.pdf
- Lire également la Carte blanche du Collectif Outils solidaires contre les violences policières