BIBLIOGRAPHIE

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La Fabrique éditions

9 septembre 2022

256 pages

ISBN : 9782358722391

Omniprésente dans les rues comme dans le débat public, la police soulève davantage de questions qu’elle ne semble pouvoir en résoudre. En mobilisant les études disponibles et en confrontant les chiffres, Paul Rocher réfute dans ce livre les présupposés au fondement du mythe policier d’une institution sans doute imparfaite mais nécessaire, au service de toute la société dont elle ne ferait que refléter les travers. Non, la police n’empêche pas le crime, et l’emprise policière croissante sur la société n’a pas d’autre fondement que la réorganisation autoritaire du pays et le maintien d’un ordre inégalitaire. Toute l’histoire de l’institution révèle sa nature violente, sa fidélité à l’ordre établi – et dément l’idée de son « dysfonctionnement ».

Peut-on pour autant se passer de police ? En s’inspirant des exemples sud-africain et nord-irlandais, où les habitants ont expérimenté des formes de gestion des conflits indépendantes de l’appareil d’État, Paul Rocher dégage les voies possibles d’un monde sans police.


ObsPol

ObsPol avait déjà eu la faveur d’un entretien avec Paul Rocher à propos de son livre « Gazer, Mutiler, Soumettre – Politique de l’arme non létale ». Son analyse précise et factuelle de la situation de l’armement de la police et ses dérives reste une source extrêmement intéressante sur le sujet.

Ici nous nous penchons sur son nouvel ouvrage dans lequel il s’intéresse à ce qu’il appelle la « police moderne », qui « désigne spécifiquement une force publique professionnelle organisée au sein d’une institution distincte, reconnaissable par le port de l’uniforme et dédiée à la préservation de l’ordre établie. Cette police moderne repose sur des agents permanents et rémunérés qui suivent les règles mises en place par l’État. Autrement dit, la police moderne n’est pas seulement une fonction, c’est un métier. » Il dénonce l’emprise policière, avec un focus sur le manque de moyens prétendus et mis en avant qui empêcherait ainsi la police d’accomplir ses tâches correctement. Intéressant ainsi de voir, chiffres à l’appui que la réalité est peut-être différente.

L’auteur soulève la question de l’effectivité et de l’utilité de l’institution police. Cette institution étatique est fondée sur ce qu’il nomme le « mythe policier » largement répandu et servant de justification aux diverses politiques sécuritaires la réglementant. L’institution policière serait donc nécessaire même si parfois admise comme imparfaite. « Toute la société serait donc servie par elle, toutefois l’on constate qu’elle n’empêche ni les crimes ni les délits ».  p9. « L’idée de réformer la police est une vieille antienne des politiques de l’intérieur (..) qui repose sur l’existence supposée de brebis galeuses en son sein dont il suffirait de diluer l’influence, à défaut de s’en débarrasser. (…) »

« En effet, il est commun de considérer les violences policières comme des débordements marginaux. » [NDLR, cela se confirme d’ailleurs au cours des – trop rares- poursuites de policiers devant les tribunaux. Tant les avocats de la défense que les juges considèrent alors qu’il s’agit d’actes de « pommes pourries » ou encore d’exceptions dues au stress ou autre facteurs tels qu’un manque de formation adéquate].

Paul Rocher toutefois démontre que c’est la nature même de l’institution policière, bâtie sur une économie politique précise (le capitalisme) et soudée par un esprit de corps unique, qui détermine le comportement des policiers.

« L’ironie vaut pour ceux nombreux, qui ont cru (souvent de bonne foi) au mythe. Et qui pourrait leur en faire reproche ? Omniprésente, cette croyance est même assez rassurante. La popularité du mythe (policier) tient sans doute en bonne partie à l’effet placebo de la police, identifié par Michelle Alexander . La possibilité d’appeler la police donne l’impression de pouvoir obtenir quelque chose dans une situation où l’alternative immédiate est généralement de ne rien obtenir du tout, de subir de manière impuissante. Peu importe que la police soit incapable de l’empêcher. »

Paul Rocher retrace l’histoire de cette institution, chapitres passionnants et instructifs car peu décrits par ailleurs. Par exemple qu’après 1789 en France le recrutement des policiers est dominé par la recommandation et marqué par la présence, très majoritaire, d’anciens militaires et ce pendant tout le XIXème siècle. Par ce biais il indique qu’elle n’a pas d’autres bases que celles qui sous-tendent une réorganisation autoritaire et le maintien d’un ordre pourtant inégalitaire. « La violence intrinsèque des forces de l’ordre fait ainsi écho à une fidélité à l’ordre établi. »

Il rappelle que la naissance de la police moderne s’est faite de manière concomitante avec l’établissement d’un État capitaliste et vise à préserver les intérêts bourgeois de l’État «née avec le capitalisme, la police n’a rien d’un phénomène transhistorique accompagnant les sociétés humaines depuis la nuit des temps, pas plus qu’elle n’a été créée pour assurer la sûreté de toute la population. Sa tâche est bien plus circonscrite : maintenir l’ordre établi. ».

L’auteur pointe aussi les deux grands problèmes de la police, c’est-à-dire son racisme et son sexisme qui sont structurels. Le racisme de la police, proviendrait du passé colonial de la France. Il est un fait que la police a très souvent affaire à une jeunesse immigrée ou descendante d’immigrés et qu’ « une essentialisation raciale en découle ».

Analysant les études disponibles et confrontant les chiffres, l’auteur réfute ainsi les présupposés au fondement du mythe policier d’une institution sans doute imparfaite mais nécessaire, au service de toute la société dont elle ne ferait que refléter les travers. En réalité la police n’empêche pas le crime. Mais pourrait-on se passer de police ? Ou qu’en est-il du « définancement » comme prôné par Black Lives Matter ? En s’inspirant des exemples sud-africain avec les comités de rue dans les townships et nord-irlandais avec le programme de « justice communautaire restaurative , où les habitants ont expérimenté des formes de gestion des conflits indépendantes de l’appareil d’État, Paul Rocher dégage des voies possibles d’un monde sans police.

Quant à l’aspect du sous-financement parmi les pensées les plus ancrées, cette conviction ne résiste pas aux études où, chiffres à l’appui, on découvre « qu’il n’y a pas de corrélation entre les dépenses pour la police et l’évolution des faits qualifiés de délinquants » et que 10 % seulement de l’activité d’un policier concerne des affaires criminelles.

En Belgique également il est courant d’entendre dire que la police nécessite une augmentation de ses finances, ainsi en 2022 le commissaire général de la police Mark Demesmaeker (« Flamingant en natuurbeschermer » NVA) s’inquiète des finances de la police et proclame que « cela fait douze ans que le budget de la police est en diminution constante » (La Libre 2022).

[Voir l’état des lieux actuel de son budget]

La Fabrique éditions

18 septembre 2020

136 pages

ISBN : 9782358722025

On pense qu’elle a toujours existé et qu’elle existera toujours, mais non : la police telle que nous la connaissons est récente et les événements actuels mettent mondialement son existence même « en question ». On trouvera dans ce livre des constats, des propos théoriques et des histoires vécues. L’ensemble est inquiétant mais cette inquiétude active est salutaire face à une institution de plus en plus militaire et violente.

« Démasquer et affronter le glissement autoritaire. À propos de l’ouvrage collectif Police » Paul Rocher, Contretemps, 5 octobre 2020

« Antonin Bernanos, assigné à résistance » Quentin Girard, Libération, 21 octobre 2020

« Frédéric Lordon : “Cette police est foutue, raciste à cœur, hors de contrôle, devenue folle de violence, d’enfermement dans le déni collectif et n’a que les épisodes d’attaques terroristes pour se refaire la cerise”. » Selim Derkaoui et Nicolas Framont, Frustration, 29 septembre 2020

Amal Bentounsi est la fondatrice du collectif « Urgence notre police assassine ».

Antonin Bernanos est militant à l’Action antifasciste Paris-Banlieue. Il a été poursuivi et incarcéré dans plusieurs affaires liées aux mouvements sociaux et à l’antifascisme.

Julien Coupat, mauvais client de l’antiterrorisme.

David Dufresne, écrivain et réalisateur.

Eric Hazan est éditeur, gérant et fondateur des éditions La fabrique, et écrivain. Derniers ouvrages parus : À travers les lignes (2017) et Balzac, Paris (2018).

Frédéric Lordon est chercheur au CNRS.

La Fabrique éditions

5 juin 2020

200 pages

ISBN : 978-2-35872-194-3

Nuages lacrymogènes, grenades de désencerclement, LBD 40… Des ZADs aux campus, des quartiers populaires aux cortèges syndicaux, manifester en France expose aujourd’hui à la violence des armes non létales. Les forces de l’ordre dégainent à la moindre occasion et la liste des blessés et mutilés s’allonge de mois en mois. Que signale cette escalade ?

Face à ce qu’il perçoit comme une crise du maintien de l’ordre, l’État attise la brutalité de sa police en la dotant d’un arsenal militaire toujours plus puissant et fourni – au grand bonheur des marchands d’armes. Démontant la rhétorique humanitaire de ses défenseurs, Paul Rocher montre que le recours massif aux armes non létales est la marque d’un étatisme autoritaire de plus en plus intolérant à toute contestation dans une période de recul social majeur. Conçues comme des armes « défensives », elles forment dans la pratique l’artillerie de l’offensive néolibérale en cours, rappelant, à quiconque entreprend d’y résister, la nécessité de l’autodéfense populaire.

« Une contribution novatrice au débat sur les violences policières. » Mathieu Dejean, Les Inrockuptibles, 5 juin 2020

« Paul Rocher : “Les armes non létales déresponsabilisent la police.” » Romain Haillard, Politis, 15 juillet 2020

« Paul Rocher : “Les forces de l’ordre font varier le niveau de violence en fonction de ce qu’elles pensent des manifestants. » Johan Faerber, Diacritik, 8 juillet 2020

Paul Rocher est économiste et diplômé en science politique de Sciences-Po Paris. Il est l’auteur de Gazer, mutiler, soumettre. Politique de l’arme non-létale (La fabrique, 2020).


Voir aussi notre entretien avec Paul Rocher

Couleur Livres

5 juin 2020

596 pages

ISBN : 978-2-87003-654

Dans quels cas les policiers peuvent-ils contrôler mon identité, me fouiller, m’arrêter ou entrer chez moi ?

Puis-je prévenir un proche que je suis arrêté et voir un avocat ?

Que peut savoir la police grâce à mon téléphone et à mon ordinateur ?

Suis-je obligé de répondre aux questions des policiers ?

Dans quel cas puis-je invoquer le secret professionnel ou le secret des sources journalistiques ?

Suis-je obligé de signer le PV ?

Et si je suis victime, comment porter plainte et vérifier si les policiers mènent sérieusement l’enquête ?

Ce manuel pratique offre des réponses claires à plus de 500 questions que tout citoyen peut se poser sur les pouvoirs de la police en Belgique et donne des pistes de réactions concrètes – modèles de lettres à l’appui – à celles et ceux qui veulent défendre leurs droits après une intervention ou une abstention policière abusive.

Cet outil, à la fois très accessible par son style et très fouillé par les nombreuses références juridiques en notes, devrait rendre service tant aux citoyens curieux qu’aux professionnels : juristes, travailleurs sociaux, personnel soignant, journalistes, enseignants, formateurs…