Impossible de passer sous silence les violences policières illégitimes et illégales outrepassant l'entendement, qui se déroulent depuis plusieurs semaines en France.
Beaucoup a été dit et écrit au sujet d’une réforme des retraites passée par la force de l’article 49.3 désormais bien connu, qui a déclenché un réel soulèvement populaire dans les rues de France.
S’est ajoutée aux nombreuses manifestations, aux rassemblements spontanés ou non, la colère en contestation de la construction d’une mégabassine à Sainte-Soline. Ce sont donc des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes (plus de 2,5 millions le seul 11 février selon le chiffre des syndicats, 963.000 selon le ministère de l’Intérieur) qui se sont retrouvées dans les rues ou dans les champs face à des milliers de policiers envoyés par le gouvernement pour « maintenir l’ordre« .
Une très large couverture médiatique en direct lors de ces manifestations que ce soit à Paris ou dans de nombreuses autres villes françaises, Nantes, Toulouse, Bordeaux ou Sainte-Soline, ne laisse aucun doute sur les agissements des forces de l’ordre qui sont sidérants. Ici une personnes isolée par les policiers qui se fait tabasser à terre, là un groupe de manifestant.e.s qui se voit chargé violemment à coups de matraque même sur le visage ou la tête, plus loin encore des arrestations massives.
Le droit de manifester est ainsi bridé par la force et la peur, les hordes de policiers qui se ruent lourdement armés et bien protégés sous leurs carapace font régner la terreur. De très nombreuses plaintes pour arrestations abusives ont aussi été dénombrées.
Ce qui trouble particulièrement ce sont les agissements sans retenue pratiquée par ces membres des forces de l’ordre. Un des dispositifs a été particulièrement dénoncé, il s’agit des BRAV-M (pour « brigades de répression de l’action violente motorisées« . Assez interpellant de voir qu’il s’agit de brigades de répression « de l’action violente« , alors que ses membres ont été parmi les plus violents. Insultes, menaces et coups infligés par ces policiers à moto sont nombreux.
Grâce à l’enregistrement de propos tenus au cours de l’interpellation de plusieurs manifestant.e.s nous avons eu la possibilité d’entendre entre autres de la bouche de certains policiers « Je peux te dire qu’on en a cassé, des coudes et des gueules » ou encore « La prochaine fois, tu montes en ambulance« . Lors de l’interpellation de ces 7 jeunes (sans qu’il soit permis d’établir, pour le moment, leur participation aux incidents) les menaces et intimidations ont été ignobles ; un jeune homme a été de plus été frappé à deux reprises. Cela en dit long sur le sentiment de surpuissance de ces policiers ainsi que leur manque total de correction la plus élémentaire, le tout couronné de racisme.
Au rassemblement autour de la mégabassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) on dénombre pas moins de 200 blessés chez les participants (47 chez les gendarmes) dont le 1er avril dernier un manifestant de 32 ans était entre la vie et la mort, un autre à peine sorti du coma.
Quatre ans après les « Gilets jaunes », huit ans et demi après la mort de Rémi Fraisse, tué dans l’explosion d’une grenade tirée par un gendarme lors d’affrontements contre la mise en place d’un barrage à Sivens (Tarn) le débat autour de la violence policière est ainsi relancé de plus belle.
Michel Forst, rapporteur spécial des Nations unies sur les défenseurs de l’environnement et anciennement sur les défenseurs des droits de l’homme, juge lui aussi la situation en France « préoccupante ».
Il est indéniable qu’il y a une inquiétude de plus en plus partagée sur la manière dont la force est utilisée en France dans la gestion des manifestations. La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a pointé des débordements « un usage excessif de la force » et rappelé que les libertés d’expression et de réunion doivent être protégées contre toute forme de violence.
D’ailleurs si les personnes en France n’osent plus se rendre aux manifestations, c’est par « peur » de la police et non des activistes (Michel Forst).
Pour Frédéric Maillard, analyste des pratiques policières et des organisations de police, il est grand temps que l’Hexagone remette en question son approche de la gestion des foules et la réforme.
À la date du 2 avril 2023 en une semaine pas moins de 38 enquêtes IGPN et IGGN ont été ouvertes depuis le début de la mobilisation sur les retraites.
Les familles des deux manifestants blessés à Sainte-Soline, Mickaël et Serge, âgés de 34 et 32 ans, ont déposé plainte notamment pour « tentative de meurtre »
- Le Monde, 01.04.2023
- Courrier international
- Le HuffPost avec AFP
- ObsPol