COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le 24 mars, lors d’une tentative d’expulsion forcée vers le Togo, Agbevide Djegon a été victime de violences policières physiques et psychologiques indignes. La CRER, Getting the Voice Out et ObsPol dénoncent des pratiques systématiques de violences policières lors d’expulsions ou de leur tentatives. Agbevide risque d’être persécuté par les autorités de son pays s’il retourne au Togo. Ses demandes d’asile n’ayant pu aboutir, il a fait une tentative de suicide le 13 mars 2017. Inconscient, il n’a pourtant été emmené à l’hôpital que le lendemain. Dès sa sortie de l’infirmerie, il a été mis en isolement, au cachot pour ensuite être expulsé.
Lorsque Agbevide est arrivé à l’aéroport, cinq hommes et une femme de la police fédérale étaient présents. « J’avais une lame sur moi, que j’ai avalée parce que je ne veux pas y retourner. Ils m’ont dit « comme ça, tu peux crever au Togo » ». Les policiers ont retiré ses vêtements pour dissimuler les traces de sang. Paniqué, Agbevide a commencé à crier, les policiers lui ont alors « écrasé le cou ». « Ils fermaient en même temps ma bouche et mon nez … j’étouffais ». Un passager s’est alors levé en criant aux policiers « Vous allez le tuer ! ». Agbevide était à moitié inconscient, le commandant est arrivé et a refusé de décoller dans ces conditions.
Durant le retour au centre fermé, un des policiers lui a lancé « Ce n’est pas terminé ! Quand tu reviendras, tu verras ce que ça va donner…»
Cette situation fait écho à celle d’Emmanuel K. dénoncée il y a quelques jours. Les récits sont concordants : humiliations, usage de la force disproportionnée et dégradante, menace d’étouffement, traitement inhumain de personnes seules face à de très nombreux policiers. L’utilisation de moyens de contrainte ou de violence fait partie de l’arsenal légal des forces de l’ordre, encore faut-il respecter les règles élémentaires. Rappelons que l’usage « légal » de la force impose que celle-ci soit « raisonnable et proportionnée« , deux éléments non respectés dans les cas présents. Les menottes ne peuvent être serrées dans le but de faire mal, on ne peut faire suffoquer une personne immobilisée et entravée ni d’ailleurs la menacer. Faudra-t-il attendre un nouveau cas de meurtre comme celui de Sémira Adamu pour qu’enfin des mesures significatives entrent en vigueur pour empêcher ces violences ?
Alors que les politiques migratoires restreignent toujours plus les droits humains, les mesures appliquées par les centres fermés et la police fédérale sont inhumaines et dégradantes. Les réalités de détention et d’expulsion sont opaques et donc peu connues de l’opinion publique, et pour cause : tentatives de suicides multiples (délibérément tues au grand public), conditions d’enfermement inhumaines, racisme, violences. La liste est longue.
Le cas d’Agbevide est un exemple parmi beaucoup d’autres. Les violences ne sont pas l’exception, elles sont devenues la règle et l’ordinaire de la trajectoire des migrants. Une violence symbolique, psychologique et physique incarnée par notre gouvernement, nos politiques migratoires, les centres de détention et les autorités fédérales.
Nous demandons la libération immédiate d’Agbevide et d’Emmanuel et dénonçons le cynisme des autorités face à des personnes vulnérables qui étaient pourtant venues chercher en Belgique protection dans le respect des droits humains.
Nous plaidons vigoureusement pour des alternatives à ces politiques d’expulsion abjectes et pour l’abolition des centres fermés.
Signataires de l’appel :
- Coordination contre les Rafles, les Expulsions et pour la Régularisation (CRER)
- Getting the Voice Out
- ObsPol