Déchaînement de violence physique et verbale contre une manif pacifique : devra-t-on bientôt regretter VDS ?
Jeudi 2 octobre. Une foule toujours plus importante se rassemble devant le Sinistère des affaires étrangères, à l’appel de plusieurs orgas humanitaires, pour protester contre l’arraisonnement par l’IOF de la flottille humanitaire Sumud pour Gaza, dans les eaux internationales (après de plusieurs tentatives d’empêcher sa progression). Malgré leur colère et leur détermination, aucune velléité d’en découdre du côté des manifestant.e.s, dont le cortège s’ébranle pour rejoindre le Parlement européen, place du Luxembourg.
Chants, musique, slogans, tout est festif et paisible tout au long du parcours. La foule se masse jusqu’à remplir complètement la place du Luxembourg, où des Robocops interdisent l’entrée de l’esplanade qui mène au Parlement européen (accueillante la maison du peuple) européen !) et l’on distingue de plus en plus de parlementaires qui sortent voir ce qui se passe, attirés par le bruit, la foule et le dispositif flicard.
Après près d’une heure et demie d’occupation, une partie des gens décident de repartir pour la Bourse pour le rassemblement quotidien de 19:00, tandis que d’autres restent pour un sit-in d’occupation de la place.
Le cortège, toujours bon enfant, s’approprie les tunnels du ring, et plusieurs groupes se dispersent pour bloquer des axes stratégiques. Les carrefours de Louise et Porte de Namur sont ainsi paralysés par des manifestant.e.s, avant que la police ne finisse par gazer tout le monde pour les disperser.
Après 20:00, environ 3 000 personnes occupent la place de la Bourse, avant qu’un appel à rejoindre les occupant.e.s de la place du Luxembourg ne soit lancé. Une manif sauvage démarre de la Bourse vers Rogier.
Tout bascule. Les Robocops bloquent les rues avec leurs fourgons et chargent la foule à plusieurs reprises. Intimidation (ils frappent leur bouclier ou leurs jambières avec leur matraque), matraquages, gaz lacrymogènes, coups portés directement à la tête, dans les jambes, insultes : de nombreux témoignages rapportent une brutalité délibérée (cf. Vos témoignages).
Plusieurs personnes ont été blessées, certaines gravement à la tête, et des arrestations ont eu lieu. Selon les informations recueillies, plus d’une dizaine de personnes ont eu le crâne ouvert sous les coups de matraques et ont dû être transportées à l’hôpital, une personne s’est fait casser le bras. La police est ensuite revenue vers la Bourse, où quelques personnes étaient assises calmement. Quatre fourgons sont arrivés, et les forces de chaos ont violemment délogé les personnes présentes.
Des participant.e.s racontent avoir été pris.e.s d’assaut sans sommation ni avertissement par des flics en civil et des Robocops venant de 3 directions différentes pour disloquer les groupes, puis chassé.e.s à la matraque, au lacrymogène et à coups de pieds, de genoux, de poing et de bouclier sous les hurlements des flics : “Cassez-vous !“, “Dégagez !“, “Cours ! Cours !“, “Vous êtes jeunes, vous allez courir !“, gazé.e.s à bout portant en plein visage. D’autres ont été matraqué.e.s aux genoux et aux jambes, ça aide sûrement pour dégager plus vite.
Malgré tout, une partie des manifestant.e.s parviennent à rejoindre la place du Luxembourg, où un tableau surréaliste les attend : sur la pelouse du rond-point, quelques dizaines de personnes continuent d’occuper la place, de chanter, de crier, d’allumer des fumigènes, devant une ligne de Robocops protégée par des barrières Nadar bloquant la sortie vers le Parlement. De chaque côté du rond-point, c’est la teuf dans les bars, la foule des hipsters qui bossent dans le quartier européen, un verre à la main, est complètement insouciante de ce qui se passe à quelques mètres, un concert bat son plein, couvrant complètement la sono des manifestant.e.s.
Un karsher arrive et prend position derrière la ligne de Robocops, ses canons dirigés vers la pelouse. 2 autres combis de Robocops arrivent derrière et déversent leur marée bleu marine vers leurs collègues. Après quelques minutes, on sent que la tension monte derrière les Nadar, ça s’équipe, ça commence à taper du tonfa sur les boucliers… Soudain, ils écartent les Nadar et se précipitent (eux aussi sans sommation) sur la pelouse, matraquant systématiquement dans leur course tout ce qui ne bouge pas assez vite pour éviter les coups, et jetant ça et là quelques nuages de pepper-spray dans les visages ahuris des gentess affolé.e.s. Ils n’iront pas plus loin que juste derrière la statue centrale : ils ont saisi la sono et s’en retournent avec derrière les Nadar, sans oublier de gazer un peu plus pour assurer leurs arrières.
La foule des occupant.e.s, plus nombreuse maintenant, reprend place face à aux Robocops sur la pelouse, plusieurs personnes s’assoient devant les Nadar, les mains en l’air ou sur la tête. D’autres derrière jettent des trucs sur les flics. Le karsher se met en route et arrose la pelouse vidée d’un coup, qui en avait bien besoin, en tâchant d’éviter les fêtards des bars d’à côté. Le temps passe. Les occupant.e.s veulent rester toute la nuit. Sous les crânes d’œuf politiques et policiers, ça commence à bouillir, faut rétablir l’ordre, pas possible que tous ces gens réclament qu’on fasse enfin quelque chose pour la Palestine et viennent nous mettre publiquement le nez dans notre caca politique !
Nouvel épisode de la série “Les flics sont lâchés comme la vérole sur le bas clergé”, encouragés par leur chefferie que plusieurs témoins ont entendu dire “Tapez-les !“, “Frappez-les !” en plusieurs endroits autour de la place. D’un coup les Robocops passent les Nadar et courent au plus vite qu’ils peuvent avec leur harnachement sur les occupant.e.s, gueulant comme des veaux menaces, ordres et insultes, distribuant coups de matraques, de pieds et de bouclier à tout ce qu’ils atteignent, le tout dans une atmosphère contaminée aux gaz lacrymo. Une partie des gentess reflue le plus rapidement possible vers la rue du Luxembourg, pourchassés par la meute enragée, qui n’hésite à faire voler les tables et les chaises des bars / restaus et à frapper les client.e.s attablé.e.s. Tout le monde est sommé dégager, jusqu’à la rue Marie de Bourgogne, première rue perpendiculaire plus haut, avant le square De Meeûs.
Celleux qui avaient eu la bonne idée de ne pas paniquer et de se fondre dans la foule des fêtards connaîtront des fortunes variées : les flics ont envahi les terrasses des bars et arrêté plusieurs personnes, en ont tabassé beaucoup plus, et semé une belle panique chez la jeunesse dorée cosmopolite. Une personne est sévèrement matraquée à la tête à plusieurs reprises, perd connaissance, reprend connaissance pour être frappée à nouveau et arrêtée.
Pendant ce temps-là, celleux qui remontaient la rue du Luxembourg vers le square de Meeûs en se croyant tranquilles vont vite déchanter : des combis arrivent à fond la caisse de chaque côté par la rue Marie de Bourgogne, bloquent le carrefour, déploie leur marée bleue qui s’attèle immédiatement à la tâche (toujours sans sommation) : c’est la battue, manifestant.e.s comme passant.e.s, tout le monde reçoit des coups dans les jambes, sur la tête, les épaules, les bras, la poitrine, dans une fureur de cris de flics et d’insultes. Une fois tout le monde évacué et la portion de rue du Luxembourg depuis la rue Marie de Bourgogne et la place du Luxembourg “sécurisée“, les choses se calment un peu.
Un combi repart doucement vers le ring, puis s’arrête sans bruit devant l’arrêt de bus du square De Meeûs. Des Robocops s’éjectent et se jettent littéralement sur les gentes qui attendent le bus, manifestant.e.s ou pas, et leur infligent le même traitement : hurlements, bousculades, projections, matraquage. Tout le monde est chassé sur quelques dizaines de mètres…
La répression-muselage des voix pro-Palestine qui s’élèvent pour dénoncer le massacre, l’arraisonnement de la flotille Sumud, la complicité de l’État belge qui laisse les marchands de canons et d’équipement alimenter l’horreur, et le sort réservé aux réfugié.e.s palestinien.ne.s, a atteint un niveau inédit ce soir en Belgique.
On retiendra :
- la tentative puérile de casser un mouvement qui ne cesse de grandir et réclame que l’État l’écoute et prenne ses responsabilités
- le pacifisme, l’absence de toute violence aux personnes et aux biens pendant toute la manifestation depuis le Ministère jusqu’au Parlement, à la Bourse et retour au Parlement
- le terrorisme d’État par l’emploi de tactiques militaires anti-guérilla pour briser le cortège, isoler de petits groupes et les terroriser
- l’absence systématiques de sommations avant les charges
- le défaut d’identification systématique de tous les policiers impliqués dans le dispositif pendant cette soirée
- le visage masqué de tous les Robocops impliqués dans le dispositif pendant cette soirée
- l’absence manifeste de volonté de disperser la foule (les policiers n’ont jamais essayé de presser la foule avec leur bouclier en avançant), mais la volonté délibérée de terroriser la foule par les cris, les insultes, les coups et le gaz
- le niveau de violence et le nombre ainsi que la gravité des blessures recensées
- l’unanimité des témoignages reçus quant aux observations qui précèdent
On déplore :
- Au moins 45 arrestations, dont au moins 2 judiciaires
- Des dizaines de personnes blessées (voir le détail ci-dessous)
- Des centaines de personnes intoxiquées au gaz lacrymo
- Des familles, des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées
- Beaucoup moins de personnes en soutien aux rassemblements le lendemain devant le Sinistère, devant l’ambassade du Maroc, devant l’ambassade d’Israël et à la Bourse…
On lâchera rien jusqu’à ce que :
- La Palestine soit libérée du Jourdain à la mer
- Les camarades palestiniens enfermés dans les centres fermés soient libérés
- Le conseil de police de Bruxelles 1000 se soit expliqué sur sa nouvelle stratégie et excusé pour ces débordements illégaux et dégueulasses
- Justice soit rendue à toutes les victimes de la police
- La police soit abolie et le système pénalo-carcéral mis à bas
Une vague de répression sans précédent dans sa violence contre les voix pro-Palestine s’est abattue les 2 et 3 octobre derniers, faisant des dizaines de blessé.e.s, des centaines d’intoxiqué.e.s et des milliers d’indigné.e.s. Les manifestant.e.s n’ont commis aucune violence. La police, le bourgmestre et l’Arizona se sont couverts de honte.
Nous appelons toute personne victime ou témoin de la brutalité policière à la Bourse, entre la Bourse, Rogier et Pacheco, à la porte de Namur ou place du Luxembourg, à nous contacter d’urgence au 0489/930.840 / obspol.1312 sur Signal / temoignages@obspol.be afin de réunir témoignages, photos et vidéos des agressions pour organiser la riposte collective qui s’impose contre ce terrorisme d’État et en soutien à toutes les victimes.
Votre identité ne sera à aucun moment transmise à la police.
TÉMOIGNEZ !
- Dernière mise à jour : il y a 15 heures - Publié le
ANALYSE
Les chiffres ci-dessous seront actualisés régulièrement au fil des nouveaux témoignages que l’on recevra et des réponses obtenues de nos répondant.e.s.
Ces chiffres sont loin de refléter l’entièreté du drame qui s’est déroulé les 2 et 3 octobre dernier :
Si vous connaissez des gentes qui ont été battues ou qui en ont vu d’autres se faire battre, demandez-leur de témoigner ici : https://voices.obspol.org/esolu/victim.php
Répression du 2-3 octobre 2025 : les profils
Profil des victimes des charges policières des 2 et 3 octobre contre les manifestations et rassemblements contre l'arraisonnement de la flotille humanitaire Sumud et pour une Palestine libreGenre | ||
Femme | 6 | |
LGBTQ+ | 7 | |
Homme | 8 | |
Tranche d’âge | ||
14-15 ans | ||
16-17 ans | 1 | |
18-30 ans | 13 | |
31-50 ans | 7 | |
51-70 ans | ||
70+ ans | ||
Lieu | ||
Porte de Namur | 1 | |
Bourse | ||
Entre Bourse et Pacheco | 18 | |
Place du Luxembourg | 3 | |
Ambassade d’Israël | 1 | |
Exposition | ||
militant.e associatif.ve | ||
militant.e politique | 9 | |
militant.e syndical.e | ||
militant.e religieux.se | ||
aucun engagement particulier | 9 | |
Presse | 2 |
Répression du 2-3 octobre 2025 : les violences physiques
Typologie des violences physiques recensées lors des charges policières des 2 et 3 octobre contre les manifestations et rassemblements contre l'arraisonnement de la flotille humanitaire Sumud et pour une Palestine libreArrestation | 45+ |
Détention | 10+ |
Bousculade / projection | 9 |
Plaquage ventral mise à plat-ventre / décubitus ventral | 1 |
“Pliage” (maintien d’une personne en position assise, la tête appuyée sur les genoux) | |
Clés aux bras douloureuses | 1 |
Coups de pieds, coups de poings, gifles | 15 |
Pied/genou sur la nuque, le thorax ou le visage | 2 |
Coups à terre ou alors que la victime est maîtrisé.e | 7 |
Coups sur les oreilles | 2 |
Étranglement | |
Doigts retournés | |
Arrosage | 2 |
Morsures de chien | |
Tirage par les cheveux | 1 |
Serrage douloureux des colsons ou des menottes | 1 |
Tirage par les colsons ou des menottes | 1 |
Sévices sexuels | |
“Tamponnage » / “Parechocage“ (percussion par un véhicule de police) | 1 |
Usage de gants | 2 |
Usage d’arme à feu | |
Usage de "Bean bags" (un sac de coton contenant de minuscules billes de plomb) | |
Usage de FlashBall | |
Usage de grenade assourdissante | |
Usage de grenade de désencerclement | |
Usage de grenade lacrymogène | |
Usage de LBD40 | |
Usage de matraques | 21 |
Usage de spray lacrymogène | 18 |
Usage de Taser | |
Usage de tranquillisants | |
Expulsion | |
Disparition | |
Serrage du visage | 1 |
Marcher sur les jambes | 1 |
Répression du 2-3 octobre 2025 : les violences psychologiques
Typologie des violences psychologiques recensées lors des charges policières des 2 et 3 octobre contre les manifestations et rassemblements contre l'arraisonnement de la flotille humanitaire Sumud et pour une Palestine libreAccusation de trouble à l'ordre public | |
Accusation d’entrave à la circulation | |
Accusation de rébellion | |
Accusation de coups à agent | |
Accusation de manque de respect | |
Accusation de menace à agent | |
Accusation d'injure à agent | |
Accusation de manque de respect | |
Accusation de refus d'obtempérer | |
Agressivité, manque de respect, insultes | 20 |
Intimidation, chantage, menaces | 16 |
Contrôle d’identité à titre vexatoire ou d’intimidation | 1 |
Intimidation ou arrestation des témoins | 2 |
Obstacle à la prise d’images | 3 |
Appels à faire cesser les souffrances restés sans effet | 45 |
Position inconfortable prolongée | 1 |
Non-assistance à personne en danger | 2 |
Prise de photos, empreintes, ADN | |
Menace avec une arme de poing | |
Tir dans le dos | |
Charge sans avertissement | 12 |
Nassage (enfermement de manifestants dans une souricière) | 2 |
Course-poursuite | 1 |
Propos sexistes | 3 |
Propos homophobes | 1 |
Propos racistes | 1 |
Intervention dans un lieu privé | |
Problèmes de santé mentale | |
Harcèlement | |
Fouille | 1 |
Perquisition | |
Violences de la part de collègues policiers | |
Passivité des collègues policiers | 7 |
Défaut ou refus d’identification des policiers | 10 |
Refus de prévenir ou de téléphoner | 2 |
Refus d’administrer un éthylotest | |
Refus de serrer la ceinture pendant le transport | |
Refus d’acter une plainte | 1 |
Refus de soins ou de médicaments | 2 |
Mensonges, dissimulations, disparition de preuves | 1 |
Déshabillage devant témoins de l’autre sexe | |
Flexions à nu devant témoins | |
Insuffisance ou absence de surveillance pendant la détention | |
Absence de signature du Registre des effets personnels lors de la détention | |
Privations pendant la détention (eau, nourriture) | |
Conditions sanitaires inappropriées pendant la détention (température, hygiène, lumière) | |
Confiscation, détérioration, destruction des effets personnels | 1 |
Pression pour signer des documents | |
Absence de procès-verbal | 1 |
Complaisance des médecins |
Répression du 2-3 octobre 2025 : les suites
Les conséquences des violences exercées lors des charges policières des 2 et 3 octobre contre les manifestations et rassemblements contre l'arraisonnement de la flotille humanitaire Sumud et pour une Palestine libreIncapacité 1-3 jours | 2 |
Incapacité 4-7 jours | 2 |
Incapacité 8-14 jours | 1 |
Incapacité 15-21 jours | |
Incapacité > 22 jours | 2 |
Plaies à la tête ou au visage | 7 |
Plaies aux membres | 3 |
Trauma crânien | 3 |
Contusions aux membres | 13 |
Contusions au dos | 3 |
Contusions au torse | 1 |
Suivi psychologique | 1 |