Toute violence illégitime doit être sanctionnée, et cela devrait valoir aussi indiscutablement pour la violence que les forces de l’ordre pratiquent contre des citoyens eux, désarmés, habillés sans protection aucune et souvent seuls face à un groupe de policiers menaçants. Et pourtant…
En ce mois estival de juillet, une nouvelle retient notre attention : un dossier de violences policières classé sans suite par la Comité P. Un de plus, sommes-nous autorisés à dire.
En effet, devant les rares plaintes qu’introduisent les victimes de violences policières, le jeu n’est pas égal. Alors que les syndicats policiers clament vouloir une « tolérance zéro » en matière d’agressions envers les policiers, on aimerait que l’inverse soit tout autant appliqué. En juin dernier, le SLFP Police, réclamait « une circulaire des procureurs généraux qui dirait clairement aux magistrats ce qu’ils doivent faire au minimum lorsqu’ils sont face à des violences contre les policiers, et qui mettrait en place une tolérance zéro contre ce type de faits » clamait Vincent Gilles, son président.
La crainte peut mener à des comportements de panique, comme en janvier 2017 lors d’un contrôle d’identité sur deux mineurs à Molenbeek sur deux mineurs : Mehdi, 15 ans, et Younes, 17 ans.
Le fait de s’enfuir devant la gifle assénée par le policier à Mehdi, entraîne alors, comme souvent observé, une escalade dans la violence exercée par les forces de l’ordre. La police aurait donné à Mehdi à ce stade, des coups de pieds et de genou en raison de sa fuite. Emmené au commissariat sans autre forme d’interrogation, il aurait été forcé à se déshabiller, il aurait enduré les insultes et les propos racistes des policiers. Rappelons le jeune âge de la victime qui se trouve ainsi démunie dans une situation effroyable de déséquilibre des forces.
Younes de son côté s’était caché devant le déchaînement policier : « Après que Mehdi ait pris la fuite, j’ai pris peur et je me suis caché aussi derrière une voiture. Un policier est arrivé et a pointé son pistolet sur moi », raconte-t-il. « J’avais peur, j’étais immobilisé. Il m’a mis à terre et m’a donné plusieurs gifles« . La police estime-t-elle donc qu’il faut dégainer parce qu’un jeune se cache derrière une voiture ? Est-il acceptable d’avoir ensuite été giflé ? Au point d’avoir le tympan perforé ?
Les familles des jeunes victimes ont porté plainte au Comité P. Elles indiquent qu’elles avaient amené des témoins de l’affaire ainsi que des certificats médicaux. Première déconvenue : elles apprennent alors que les caméras du commissariat ne fonctionnaient pas ce jour-là… Un courrier du procureur du Roi que met enfin un terme à leur attente, par une seconde déconvenue : « L’enquête n’a pas permis de réunir des charges suffisantes à l’encontre du suspect [le policier, NDLR] ». Le dossier a été classé sans suite.
Et voilà, un nouveau dossier classé sans suite. Selon les déclarations du porte-parole de la zone concernée, J. Berckmans, il s’agirait d’un « bon signal« , prouvant qu’ils [les policiers, NDLR] « connaissent ‘la stratégie’ de certains jeunes et qu’une fois ‘qu’ils se blessent’ ils décident de déposer plainte« . Mais quelle est donc la « stratégie » des policiers dont les caméras ne fonctionnent pas? Prêts à dégainer devant un jeune, se permettant des gifles, des humiliations, des propos racistes ?
Une fois encore, les questions restent posées :
Comment une victime peut-elle apporter des preuves qui suffiraient au Comité P ?
Comment garantir tout au long de la procédure, du début de l’intervention policière à la libération de la victime, les droits de celle-ci à être traitée dignement et dans le respect de ses droits élémentaires ?
Devant ce genre d’affaires, ObsPol ne peut que déplorer qu’en Belgique, le chœur des responsables policiers et politiques soit unanimement silencieux. Aux États-Unis, où les violences policières se mesurent sur une toute autre échelle (elles sont responsables de plus de 300 morts depuis le début de l’année), le nouveau Président, après avoir été applaudi lors d’un discours devant des officiers de police à Long Island (New York) pour avoir encouragé la police à ne pas prendre de gants dans leurs interventions, a été successivement désavoué par la hiérarchie policière et les procureurs de nombreux États, sans parler des ONG, chercheurs, journalistes etc.