Le non-respect de cette confidentialité, voire l’écoute, sont clairement une violation des droits de la défense pourtant pratiquée par certains commissariats de police.
Illégalité dans les commissariat, écoutes et enregistrements organisés
Dans son récent rapport (approuvé en mars 2022), le COC, Organe de contrôle de l’information policière, institution parlementaire fédérale autonome en charge de la surveillance de la gestion de l’information policière, et est l’autorité de protection des données pour la police intégrée, l’unité d’information des passagers et l’inspection générale de la police fédérale et de la police locale, préconise que chaque entité de police devra être dotée dans les cinq ans, d’un local distinct permettant d’assurer la confidentialité de la concertation entre le ou la suspect.e et son avocat.e, en effet il est apparu que dans un grand nombre de cas celle-ci peut actuellement être surveillée illégalement.
Le COC, institution parlementaire autonome, a effectué un contrôle de l’utilisation au sein de la police intégrée, des systèmes d’enregistrement ou d’écoute tels que des caméras ou autres systèmes audiovisuels, utilisés par la police, des concertations confidentielles qui avaient lieu au bureau de police entre le ou la suspect.e et l’avocat.e.
Ceci avait été mis à jour début 2021 lorsqu’un avocat et son client se sont rendu compte qu’une conversation qu’ils avaient eue juste avant une audition dans un commissariat de la zone de police d’Erpe-Mere/Lede en Flandre orientale, avait été écoutée par les enquêteurs. Le client avait déposé plainte auprès du COC.
Les salles de concertation confidentielle équipées de systèmes de surveillance
L’enquête du COC a permis de constater qu’au moins 60 salles de concertation confidentielle, qui sont dans 40 % des cas les mêmes salles où se font les auditions des suspect.e.s par la police, étaient équipées d’un système de surveillance par caméra et que 29 pouvaient pratiquer l’écoute en temps réel ou l’enregistrement.
Elle a aussi montré une méconnaissance des aspects juridiques de cette matière. « Les entités de police ne tiennent pas compte de la distinction fondamentale entre la surveillance au moyen d’un système automatisé (caméra/système audiovisuel) et la surveillance purement sensorielle » (visuelle, derrière une paroi vitrée).
« La surveillance de sécurité doit être considérée comme une violation du droit fondamental à la concertation confidentielle« , souligne l’Organe de contrôle, et « le fait que la surveillance par caméra pendant la concertation confidentielle soit exercée ou non en temps réel ou que les images soient accessibles uniquement de manière rétroactive et restreinte n’y change rien« .
[…] « Une surveillance de sécurité permanente mise en place de manière structurelle constitue une violation du droit fondamental. Le risque que des nouvelles technologies (intelligence artificielle) soient dans ce contexte utilisées n’est certainement pas illusoire« , met en garde l’instance de contrôle.
Parmi ses recommandations, l’organe réclame une réglementation pour que la concertation confidentielle ait lieu exclusivement dans un local distinct, utilisé uniquement à cette finalité, avec un délai de 5 ans pour que toutes les entités de police satisfassent à cette exigence.
Une surveillance visuelle par caméra ne peut être décidée par la police que dans des cas très exceptionnels (risques pour l’intégrité physique) en présence de circonstances dangereuses graves et particulières avérées, mais en aucun cas la conversation ne peut être enregistrée.
La question qui pourrait se poser : les agissements pratiqués impunément dans les commissariats ne seraient-ils le fruit que d’une prétendue méconnaissance de la loi ? Assurent-ils la légalité et la protection à laquelle tout.e.s citoyen.ne s’attend ou les mettent iels en danger ?
Si ObsPol salue cette décision bienvenue, nous déplorons l’absence de mesures plus concrètes qui permettraient d’éviter que ne se reproduise ces entorses intolérables : pourquoi ne pas imposer un panneau de bonnes dimensions sur la porte même du local, qui indiquerait à la fois que le local est sous surveillance, les droits de la défense en la matière et comment mettre hors circuit les systèmes de captation ? Un simple « bouton bien visible permettant de l’activer et de le désactiver » nous paraît un peu court, surtout si l’on pense au contexte stressant dans lequel ces entretiens ont lieu, qui ne permettent pas toujours d’avoir la tête suffisamment froide pour penser à ce genre d’infimes détails…
Pourquoi également ne pas recommander que la défense puisse, si elle constate l’existence d’un système de flicage dans le local où on la conduit, exiger qu’un autre local lui soit proposé si la onfidentialité de ses échanges ne lui paraît pas assurée ?
Il suffit de se rappeler les débats (et les exemples concrets) à propos des bodycams, et plus encore des caméras dans les commissariats, pour voir les limites de ces recommandations : si la police est seule responsable des images (si elle décide seule du déclenchement du système, de l’arrêt, du stockage, de la conservation des images et de leur production en justice), quelles garanties effectives pour le citoyen ? Il est tellement facile de désactiver le petit témoin rouge d’une caméra ou de prétendre qu’elle malfonctionne, d’altérer le « footage« .
Ici plus encore qu’ailleurs, la défiance envers la police devrait s’imposer, la police étant la partie adverse de la défense, et non un organe neutre de l’État, il est nécessaire que des mesures strictes de séparation des rôles soient mises en place. Que la police visionne ou filme des auditions peut être légitime voire nécessaire (encore une fois à condition qu’elle ne soit pas en contrôle total des images). Qu’elle le fasse lors de concertations confidentielles entre un.e avocat.e et son.sa cliente est une atteinte criante aux droits de la défense.