2 juin 2025, Avenue des Gloires Nationales – Ganshoren
11 ans. Percuté après une course-poursuite : décédé
Lundi 2 juin, Fabian, un enfant de 11 ans, se déplaçait sur une trottinette. Une voiture de police de la zone de police Bruxelles Ouest (Jette/Ganshoren/Koekelberg/Molenbeek-Saint-Jean/Berchem-Sainte-Agathe) a percuté et tué Fabian près du parc Élisabeth à Ganshoren. L’accident a eu lieu vers 18 heures lors d’une course-poursuite pour un motif qui reste encore à déterminer.
Selon Walter Derieuw, porte-parole des pompiers, la collision a eu lieu vers 17:50 et les services d’urgence se sont rendus sur les lieux. La victime a été réanimée sur place et transférée à l’hôpital, où elle a succombé à ses blessures
Ce n’est pas la première fois qu’un tel accident se produit. Il y a moins d’un mois, une voiture de police a tué Christophe Amine en le renversant rue Blaes à Bruxelles, également lors d’une course-poursuite. En mai 2017, Sabrina et Ouassim ont aussi été tués renversés à l’issue d’une course-poursuite. Tout comme Adil et Mehdi.
Quel que soit le motif de la course-poursuite entamée, les dangers d’une telle course sont connus et ont maintes fois été démontrés.
La version de témoins
Selon plusieurs témoins de la scène avec contactés par Bruxelles Dévie, la voiture de police aurait effectivement traversé le parc « à toute allure » derrière Fabian. L’enfant s’est engagé sur la pelouse, la voiture de police qui le suivait à toute vitesse, sans gyrophare ni sirènes, l’aurait alors renversé. La voiture de police aurait ensuite roulé sur le corps de l’enfant.
Un témoin direct de la scène nous a contacté·es et assure avoir vu la voiture « tamponner » (renverser) Fabian :
« Je rentrais chez moi et j’ai vu une voiture de police suivre un enfant en trottinette. Ils étaient sur le sentier principal à grande allure. Le petit a eu peur et a été sur la pelouse, tremblotant sur sa trottinette. La police a bifurqué sur la pelouse en sortant du sentier et a renversé et roulé sur l’enfant. Son corps est passé sous les roues. La voiture a ensuite été se garer plus loin et les policiers ont couru vers l’enfant qui était en sang et recroquevillé, il semblait déjà mort. Ils étaient deux policiers, une femme et un homme. L’homme, le conducteur, a secoué l’enfant et la femme a commencé à agresser les témoins de la scène. 5 minutes après, beaucoup de policiers sont arrivés pour quadriller le secteur. L’ambulance n’est arrivée que 17 minutes après, en essayant de réanimer le garçon, qui était déjà mort. »
Selon les témoignages de voisin·es, après avoir renversé l’enfant, les policiers ont interdit aux témoins de la scène de filmer ce qui se passait. Ils ont également contrôlé toutes les personnes présentes et des témoins ont été insulté·es et menacé·es. Les policiers ont invoqué la dangerosité des trottinettes sur le trottoir pour tenter de justifier l’accident. Un policier aurait déclaré :
« Quand vos jeunes roulent sur les trottoirs et tuent des petites vieilles sur le trottoir on ne dit rien »
Ce à quoi les personnes rassemblées en face de la police ont répondu « Ça mérite de tuer quelqu’un c’est ça ? Ça mérite de le tuer, parce qu’il a roulé sur un trottoir ?! »
Par ailleurs, des habitant·es du quartier dénoncent une conduite policière dangereuse récurrente dans le parc Elisabeth. « Depuis que le parc a été désigné comme un hotpost de deal, ils conduisent comme des cow-boys. » [par le Conseil Régional de Sécurité de Bruxelles en février 2025, dans le cadre de sa « guerre contre drogue » . La stratégie des hotspots est sécuritaire et répressive, elle vise à démultiplier les interventions et la présence des forces de l’ordre dans certains lieux où des trafics de drogue peuvent avoir lieu.]
La maman de la victime s’est rapidement rendue sur place mais n’a pas pu voir son fils, qui avait directement été emmené par les secours. Elle a seulement pu consulter une photo pour identifier la victime.
La version de la police
D’après le premier procès-verbal rédigé suit au décès de Fabian, un contact avec le dispatching a eu lieu une dizaine de minutes après l’impact afin de « constater un accident entre un véhicule de police de la ZP BWEST et un conducteur d’un engin de déplacement motorisé« , indique le document, précisant que « le conducteur de l’engin de déplacement motorisé serait dans un état grave. » Il est également indiqué que les gestes de premiers secours sont appliqués en attendant l’ambulance et les renforts.
Le flic conducteur, un homme de 26 ans qui a obtenu son permis en 2023, serait en « état de choc« . Son alcootest est décrit comme « safe« . Les différents dégâts du véhicule de police et de la trottinette sont également repris dans le P.V. qui évoque plus loin un « accident avec mort d’homme sans circonstances aggravantes« . Fabian est décrit par l’un des témoins comme « un jeune garçon âgé d’environ 7 à 10 ans« , précisant qu’il se trouvait sur une trottinette suivie par un véhicule de police roulant très rapidement. Il ajoute que « malgré sa proximité avec l’enfant, le véhicule n’a pas ralenti« . Les deux autres témoins se sont aussi étonnés de la vitesse du véhicule de police.
Selon la police, Fabian circulait « sur une trottinette électrique, alors qu’il n’en avait pas l’âge légal » fixé à 16 ans pour ce type d’engin. Fabian aurait pris la fuite lorsque la police a voulu le contrôler, a indiqué mardi matin le parquet de Bruxelles, se référant aux premiers éléments de l’enquête.
« Il semble, des premiers éléments de l’enquête et de la descente effectuée par le parquet, que le jeune circulait sur une trottinette et que le véhicule de police a souhaité procéder à son contrôle« , a déclaré la magistrate de presse, Sarah Gillet. « Le jeune a pris la fuite et une course-poursuite a été entamée ».
Le parquet de Bruxelles a annoncé l’ouverture d’une enquête afin de déterminer d’où provient la fuite de ce procès-verbal dont la parution nuirait à la sérénité de l’enquête.
La version de la famille
Younes :
« Tout d’abord, il s’agissait de la trottinette de son grand frère et Fabian faisait simplement un petit tour dans le parc. De ce que me dit la famille, la police a voulu saisir la trottinette. Ils ont donc essayé de le contrôler. Fabian aurait dit qu’il ne comprenait pas pourquoi on le contrôlait, qu’il allait les conduire chez son frère, le propriétaire de la trottinette.
La police n’aurait visiblement rien voulu entendre. Ils ont accéléré et l’ont écrasé. Ils ont roulé dessus. Ce n’était pas une course-poursuite. C’est un peu cheap comme explication. Fabian faisait juste un tour dans le parc et il n’y avait aucune course-poursuite, aucun gyrophare, rien du tout. La voiture de police n’est même pas passée sur la route ou sur le chemin de gravier. Elle est passée à travers l’herbe. Donc il n’y a aucune course-poursuite. »
Younes, qui insiste sur le fait que Fabian n’a pas cherché à éviter un contrôle et se dirigeait vers son frère, le propriétaire de la trottinette, au moment de l’accident.
Les réactions
Pour procéder à une interpellation, les services de police doivent respecter un principe de proportionnalité, comme le rappelait la LDH après d’autres décès survenus lors de courses-poursuites policières :
« […] s’il existe un risque de porter atteinte à la vie de la personne poursuivie, la police doit effectuer une balance d’intérêt et se poser notamment la question suivante : la mise en danger de la vie de l’individu est-elle justifiée pour procéder à l’intervention ? Autrement dit : est-ce que lancer une course-poursuite à vive allure dans les rues de la ville ou pour procéder à l’arrestation de personnes non armées et soupçonnées d’infractions relativement mineures est nécessaire ? »
Comme à chaque fois que la police est impliquée dans la mort d’une personne, le parquet et des médias traditionnels justifient implicitement l’intervention policière et rendent coupable la victime de sa propre mort. Depuis hier, les médias nous expliquent que « rouler en trottinette est interdit aux moins de 16 ans en Belgique« , comme si cela pouvait justifier le fait que la police ait le droit de tuer un enfant de 11 ans. Le parquet explique que la police a voulu le « contrôler » en raison de son âge et de son usage de sa trottinette, et qu’alors l’enfant a « pris la fuite » et que cette fuite serait responsable de la « course-poursuite » et finalement de sa mort.
Le Délégué général aux droits de l’enfant, Solayman Laqdim, a exprimé sa profonde tristesse, soulignant la gravité des faits et appelant à une réflexion sur la proportionnalité des interventions policières impliquant des mineurs. « Les policiers ont une responsabilité immense, et une vigilance accrue est nécessaire lorsqu’ils sont confrontés à des enfants. Nous attendons que toute la lumière soit faite«.
Le député fédéral Ridouane Chahid (PS) a questionné les méthodes policières face aux mineurs, demandant au ministre de l’Intérieur quelles règles et quelles leçons seront tirées de ce drame. « La lumière doit être faite ».
Bernard Quintin (MR), ministre de l’Intérieur : « Mes pensées vont à la famille et aux proches. »
De son côté, la députée bruxelloise Aline Godfrin (MR) : « Pas un jour ne se passe à Bruxelles sans voir des mineurs risquer leur vie sur une trottinette ».
Kalvin Soiresse Njall (Ecolo), député bruxellois : « Qu’est-ce qui peut justifier la poursuite d’un enfant par la police au point de le percuter violemment par l’arrière ? »
Le député fédéral Nabil Boukili (PTB) a ajouté que toutes les réponses doivent être apportées concernant les circonstances de l’accident.
Fouad Ahidar, pour la Team éponyme, a réclamé justice et vérité, affirmant qu’une enquête est indispensable.
Enfin, Mathias Vanden Borre (N-VA), député bruxellois, a exprimé ses condoléances à la famille.
Emile Luhahi, député bruxellois (Groen), a qualifié les faits d’« échec collectif » et a annoncé son intention d’interpeller les autorités compétentes sur la question.
Younes, le cousin de Fabian, explique à la RTBF qui il était :
C’était mon petit-cousin. C’était un enfant de douze ans comme tant d’autres. Il aimait jouer à la PlayStation, il faisait ses devoirs. […] Mon petit-cousin était quelqu’un de bien. Il était tout le temps à la maison. Et malheureusement, quand il sort, il se passe des choses horribles… Il était en sixième primaire. Il allait passer son CEB… »
Des centaines de personnes étaient présentes pour commémorer la mémoire de Fabian, et réclamer la justice et la vérité le 5 juin. Sa famille, originaire de Moldavie, devrait être reçue par le Roi Philippe dans les prochains jours.
Violences physiques
Bousculade / projection | |
Coups de pieds, coups de poings, gifles | |
Pied/genou sur la nuque, le thorax ou le visage | |
Coups à terre ou alors que la victime est maîtrisé.e | |
Coups sur les oreilles | |
Étranglement | |
Clés aux bras douloureuses | |
Doigts retournés | |
Arrosage | |
Morsures de chien | |
X | Pare-chocage (percussion par un véhicule de police) |
Plaquage ventral | |
Tirage par les cheveux | |
Serrage douloureux des colsons ou des menottes | |
Tirage par les colsons ou des menottes | |
Usage de gants | |
Usage d’arme à feu | |
Usage de « Bean bags » (un sac de coton contenant de minuscules billes de plomb) | |
Usage de FlashBall | |
Usage de grenade assourdissante | |
Usage de grenade de désencerclement | |
Usage de grenade lacrymogène | |
Usage de LBD40 | |
Usage de matraques | |
Usage de spray lacrymogène | |
Usage de Taser | |
Usage de tranquillisants |
Violences psychologiques
Accusation de trouble à l’ordre public | |
Accusation de rébellion | |
Accusation de coups à agent | |
Accusation de menace à agent | |
Accusation d’injure à agent | |
Menace avec une arme de poing | |
Agressivité, manque de respect, insultes | |
Appel à faire cesser les souffrances restés sans effet | |
Prises de photo / empreintes | |
Propos sexistes | |
Propos homophobes | |
Propos racistes | |
Violences de la part de collègues policiers | |
Passivité des collègues policiers | |
Défaut ou refus d’identification des policiers | |
Contrôle d’identité à titre vexatoire ou d’intimidation | |
Intimidation ou arrestation des témoins | |
Obstacle à la prise d’images | |
Refus de prévenir ou de téléphoner | |
Refus d’administrer un éthylotest | |
Refus de serrer la ceinture pendant le transport | |
Refus d’acter une plainte | |
Refus de soins ou de médicaments | |
Mensonges, dissimulations, disparition de preuves | |
Confiscation, détérioration ou destruction d’effets personnels | |
Déshabillage devant témoins de l’autre sexe | |
Flexions à nu devant témoins | |
Insuffisance ou absence de surveillance pendant la détention | |
Absence de signature du Registre des effets personnels lors de la détention | |
Pression pour signer des documents | |
Absence de procès-verbal | |
Privations pendant la détention (eau, nourriture) | |
Conditions sanitaires inappropriées pendant la détention (température, hygiène, lumière) | |
Complaisance des médecins | |
Nassage (enfermement de manifestants dans une souricière) | |
Position inconfortable prolongée |
- 000.06.2025 – Ouverture d’une enquête par le Comité P; nomination d’un expert automobile et d’un légiste
- 02.06.2025 – Agression et décès de Fabian
- 2025.06.09_LAvenir_Malgre.Sa.Proximite.Avec.L.Enfant.Le.Vehicule.N.A.Pas.Ralenti.Une.Fuite.Dans.La.Presse.Interpelle.Le.Parquet.Concernant.La.Mort.Du.Jeune.Fabian.pdf
- 2025.06.05_RTBF_Apres.La.Mort.De.Fabian.Le.Ministre.De.L.Interieur.Demande.A.La.Police.Une.Analyse.Poussee.De.La.Pratique.Des.Courses-poursuites.pdf
- 2025.06.04_Stuut_La.Police.Tue.Fabian.11.ans.Retour.Sur.Les.Faits.pdf
- 2025.06.03_LeVif_Emotion.Et.Colere.A.La.Veillee.Pour.Fabian.11.ans.Mortellement.Percute.Par.La.Police.A.Ganshoren.pdf
- 2025.06.02_Stuut_La.Police.Poursuit.Et.Tue.Un.Enfant.De.12.Ans.pdf
- 2025.06.02_RTBF_Un.Enfant.De.12.Ans.Meurt.Apres.Une.Course.Poursuite.Avec.La.Police.A.Ganshoren.pdf
- Avocat :
- Collectif :
- Cagnottes : Fondation Marius Jacob – BE 12891964071892 avec comme communication : FABIAN // GoFundMe
- Dernière mise à jour : il y a 4 jours - Publié le