
Catégorie : Edito

18.07.2023 – Répression féroce à la maxi-prison de Haren
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 18/07/2023

Plusieurs dizaines de policiers anti-émeutes ont été déployés vers 23:00 et ont violemment réprimé les détenus. Des images ont été rendues disponibles à l’aide de stories Snapchat filmées depuis l’intérieur.
Selon les informations disponibles, la révolte aurait commencé à la suite d’une fouille de cellule d’un détenu : cette fouille était-elle abusive, les agent.es pénitencier.ères ont-ils laissé la cellule dans un sale état, des objets personnels ont-ils été saisis ? Par la suite, le détenu dont la cellule a été fouillé aurait appelé à se révolter.
Après la promenade du soir, plusieurs détenus sont restés sous le préau pour se révolter et se sont attaqués aux caméras et autres dispositifs installés.
Comme le rappelle Bruxelles Dévie :
« La maxi-prison d’Haren a ouvert ses portes fin septembre 2022, elle occasionnera la fermeture des prisons de Saint-Gilles et Forest. Son ouverture et sa création sont au cœur d’intérêts économiques, politiques et écologiques que nous avons documenté dans un article paru l’année dernière. Par exemple, la désaffection des prisons de Saint-Gilles et Forest vont permettre aux pouvoirs publics de continuer la gentrification de ces quartiers.
Nous rappelons que la Belgique est régulièrement pointée du doigt pour sa politique carcérale tout simplement inhumaine et qu’elle est régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme.
La prison loin de résoudre les problèmes sociaux et les «crimes», ne fait que briser les personnes incarcérées et leurs proches (le plus souvent, les proches sexisées), augmenter d’une manière important ce qu’on appelle les « récidives » et reproduire les inégalités sociales, sans prendre compte les besoins des victimes. La prison est le problème, pas la solution. »
Rappelons aussi que la construction de cette maxi-prison de 2000 détenus à fait la quasi-unanimité contre elle : magistrats, avocats, greffiers, collectifs de détenus, de familles de détenus, assistants sociaux etc. De nombreuses études dans le monde existaient déjà montrant sans équivoque qu’au-dessus de 400 détenus, tous les problèmes liés à l’incarcération ne font que s’amplifier.
Les contraintes liées aux déplacements, dans une zone au trafic difficile ne sont pas pour alléger le fardeau de toutes les parties prenantes… Bel exemple de « rationalisation économique » qui ne fait aucun sens…
16.07.2023 – De la plus que nécessaire réglementation de l’usage « légitime » de la violence par la police
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 16/07/2023

Des lois opportunes pour permettre à la police d'agir encore plus ardemment à l'encontre des citoyens. Plus besoin "d'une menace immédiate" contre les agents pour qu'ils puissent ouvrir le feu.
Suite à la tragique mort d’un jeune de 17 ans tué par un tir policier à bout portant, il est plus qu’inquiétant que les États, français en l’occurrence, se dotent d’outils pour étendre encore l’usage « légitime » de la violence par les forces de l’ordre.
Alors que pour le-la citoyen.ne lambda le simple fait de bander les muscles lors d’une arrestation est considéré comme « rébellion« , peut donner lieu à des poursuites et être pénalisé, les policier-ères eux et elles, reçoivent entre leurs mains les instruments leur donnant un atout de plus pour donner la mort !
Nous revenons sur les événements dramatiques qui ont secoué la France au cours du mois de juin dernier et mis au jour, une nouvelle fois, avec quelle hargne les policiers-policières traitent les personnes qu’iels sont sensé.es protéger, une pointe de racisme sous-jacente…
Revue de presse, juillet 2023 :
France, le 27 juin 2023 Nahel a été assassiné par un policier qui a tiré à bout portant. Il a été touché mortellement au bras puis au thorax. Un témoin passager raconte qu’après avoir mis en route les gyrophares, les policiers qui poursuivaient la voiture auraient demandé à ce que le véhicule s’arrête.
Les jeunes s’arrêtent et auraient reçu des coups de crosse et auraient été menacés de mort « Coupe le moteur ou je te shoote« , « Bouge pas ou je te mets une balle dans la tête« , « Shoote-le« . Nahel s’effondre et le policier qui était au niveau du pare-brise tire, le pied de Nahel a alors enfoncé l’accélérateur. « Je l’ai vu agoniser, il tremblait. On a percuté une barrière« .
Comme il arrive très fréquemment en France ou en Belgique, les policiers s’empressent de donner une version des faits les mettant à l’abri de toute poursuite commettant un rapport qui les présente en légitime défense en accusant Nahel d’avoir commis un délit de fuite, de conduite dangereuse et pour couronner le tout de tentative d’homicide involontaire. Ceci leur permettant de devancer une quelconque enquête fournissant de toutes pièces des éléments d’impunité. C’est ainsi que le procureur de la République de Nanterre ouvre une instruction pour tentative d’homicide de policiers contre Nahel.
Ce ne sera que grâce à une vidéo ultérieurement que le récit se transforme. Pas vaguement, au contraire. La situation étant en réalité que Nahel fut tué par la police lors du contrôle routier. Le gouvernement français fut contraint de l’annoncer.
Depuis les violences qui ont suivi cet assassinat, l’IGPN l’inspection générale de la police nationale, la police des polices en France, et l’IGGN son pendant pour la gendarmerie n’ont été saisies « que » 10 fois selon le ministre de l’Intérieur.
L’une de ces enquêtes est menée par l’IGPN après qu’un jeune homme, dans le coma, eut été grièvement blessé à la tête à Mont-Saint-Martin, dans l’est de la France où intervenait le Raid, une unité d’élite de la police, le 30 juin 2023.
Une autre, menée par l’IGPN et la police judiciaire, concerne la mort d’un homme de 27 ans dans la nuit de samedi à dimanche à Marseille, possiblement victime d’un tir de projectile de « type flash-ball« , selon le parquet.
Une loi de 2017 sur l’utilisation des armes à feu pour la police en France semble ne pas être étrangère à l’utilisation accrue par les policiers de leur arme.
Simon Varaine [Docteur en sciences politiques et chercheur associé au laboratoire Pacte – ses recherches portent sur le terrorisme et les politiques de maintien de l’ordre] :
« Ces phénomènes se sont multipliés très récemment et c’est très inquiétant. Treize personnes ont été tuées par les forces de l’ordre en 2022 pour un refus d’obtempérer.
[La mort de Nahel est le résultat] « d’un changement de loi en 2017, qui a dérégulé les conditions d’utilisation des armes à feu pour la police. [Depuis la modification de la loi], les policiers peuvent tirer sur des individus en fuite qui sont susceptibles, au cours de leur fuite, de mettre en danger la vie d’autrui […] qui ouvre à toute une série d’interprétations.
On voit très clairement un effet de cette loi. Au-delà de ces situations individuelles, on voit en fait un effet général de multiplication de ces situations. Donc ce n’est pas simple. C’est un phénomène plus global et plus systémique qui doit être mis en cause. »
Questions franceinfo : « Treize décès enregistrés l’année dernière après des refus d’obtempérer lors de contrôles routiers. Ce record est-il à mettre au compte justement de cette loi qui a changé beaucoup de choses dans l’appréciation de la légitime défense ? »
« Tout à fait. On a fait un recensement de ces personnes tuées à la suite de tirs policiers. […] On ne l’observe pas pour la gendarmerie où la loi n’a pas apporté de changement par rapport à la doctrine qui était en vigueur. Très clairement, on en conclut que c’est un effet de la loi. »
Franceinfo : « Qu’est-ce qui a changé dans la loi en 2017 ? »
« Pour la police nationale, avant cette loi, le droit qui s’appliquait était le même que pour les citoyens qui était un droit de légitime défense, de riposte simultanée, nécessaire et proportionnée.
Avec cette loi, il y a eu l’introduction de l’idée que les policiers peuvent tirer sur des individus en fuite qui sont susceptibles, au cours de leur fuite, de mettre en danger la vie d’autrui. Donc, il y a une notion de susceptibilité qui ouvre à toute une série d’interprétations par rapport à la version plus stricte qui préexistait avant.
Ce qu’on note aussi, c’est que l’interprétation qui a été donnée suite à la loi par les directions de police et de la gendarmerie diffère. On a pu voir que dans le cas de la police nationale, les directives qui ont été données ont mis en avant le fait qu’il n’y avait plus besoin d’une menace immédiate contre les agents pour qu’ils puissent ouvrir le feu.
- BFMTV
- France Bleu, 06.07.2023
- France Info, 28.06.2023
11.07.2023 – Affaire Ilyes : la LDH dénonce des manquements dans l’enquête
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 11/07/2023

Deux ans et demi après la mort d’Ilyes Abeddou dans la garde zonale de la police de Bruxelles-Capitale/Ixelles, l’affaire devrait en principe être fixée devant la chambre du conseil. Alors que l’instruction est terminée depuis plus d’un an, la Ligue des droits humains constate l’inaction du parquet dans ce dossier et dénonce les manquements de l’enquête : les recommandations du Comité P n’ont pas été suivies, les policier·ères présent·es la nuit de la mort d’Ilyes n’ont pas été pas entendu·es. Depuis la mort d’Ilyes, deux autres personnes ont perdu la vie dans ce commissariat. La Ligue rappelle l’obligation de mener des enquêtes effectives, lorsqu’une personne meurt au contact de la police.
Communiqué de presse de la LDH :
Ilyes Abeddou a perdu la vie le 19 janvier 2021 dans une cellule de la garde zonale de la police Bruxelles-Capitale/Ixelles. Ce trentenaire algérien, sans-papier, avait été arrêté la veille dans un centre commercial bruxellois. La Ligue des droits humains regrette que l’instruction de cette affaire ait été clôturée en mars 2022, alors qu’aucun·e des des intervenant·es dans ce dossier n’a été entendu·e.
Des questions en suspens
Pourtant, des questions importantes persistent : pour quelles raisons Ilyes Abeddou n’a-t-il pas été libéré peu après 1 heure du matin alors que l’Office des étrangers avait notifié qu’il pouvait l’être. L’autopsie révélera qu’Ilyes est mort entre 5 et 9 heures du matin.
Le Comité P, saisi de l’affaire, avait recommandé l’audition des policier·ères de garde cette nuit-là. Pour quelles raisons la juge d’instruction n’a-t-elle ensuite pas jugé utile de procéder à ces auditions pourtant indispensables ? La Ligue des droits humains, au travers de ses avocates, en avait également fait la demande mais celle-ci a été rejetée par la juge. Ces devoirs complémentaires sont essentiels pour comprendre ce qu’il s’est passé la nuit du 19 janvier 2021, la Ligue demande fermement qu’ils soient réalisés.
Plus d’un an après avoir clôturé l’instruction, le dossier n’a toujours pas été fixé devant la chambre du conseil.
Obligation d’une enquête effective
La Ligue des droits humains et l’association DoucheFLUX avaient décidé de se porter parties civiles dans le cadre du décès d’Ilyes Abeddou en juin 2021. Très vite, le parquet de Bruxelles communiquera que les premiers constats de l’autopsie ne révélaient « ni trace de violences, ni intervention de tiers ».
Les circonstances de la mort d’Ilyes restaient pourtant très floues. Les deux associations demandaient qu’une enquête sérieuse et impartiale soit menée dans ce dossier pour faire la lumière sur les circonstances de la mort d’Ilyes. Cette enquête effective est en réalité une obligation de la Cour européenne des droits de l’homme quand une personne perd la vie, au contact avec les forces de police.
Trois décès en deux ans
Depuis la mort d’Ilyes Abeddou, on dénombre deux autres décès dans des cellules de la garde zonale de la police Bruxelles-Capitale/Ixelles. Mohamed Amine Berkane, jeune homme sans-papier, également de nationalité algérienne, y est décédé en décembre 2021. On se souvient également, en janvier 2023, de la mort de Sourour Abouda, dossier que le parquet a refusé de mettre à l’instruction. Une décision que condamnait la Ligue des droits humains il y a quelques mois, car elle avait notamment pour conséquence de faire peser sur la famille de Sourour Abouda la responsabilité de se constituer partie civile.
La Ligue des droits humains dénonce le mauvais signal que sont les manquements dans l’enquête sur la mort d’Ilyes Abeddou et elle regrette que la justice ne mette pas les moyens pour répondre aux questions restées en suspens dans ces différentes affaires. La Ligue des droits humains réitère sa demande que des devoirs complémentaires soient réalisés, sans quoi la vérité ne pourra se manifester.
- Étiquettes Ilyes Abbedou
03.07.2023 – L’assassinat de Nahel comme révélateur des violences policières en Belgique
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 03/07/2023

Le jeune Nahel a été assassiné mardi 27 juin 2023 par un policier qui a tiré à bout portant, le touchant mortellement au bras puis au thorax....
Les policiers qui poursuivaient la voiture auraient demandé à ce que le véhicule s’arrête, ce que les jeunes ont fait s’arrêtant sur le côté de la voie de bus sur l’avenue Joliot Curie à Nanterre.
Après avoir reçu trois coups de crosse et avoir été menacé de mort (“Coupe le moteur ou je te shoote”, “Bouge pas ou je te mets une balle dans la tête”, “Shoote-le !”), Nahel s’effondre, lâche la pédale de frein de la voiture à la boîte de vitesse automatique, ce qui aurait fait avancer la voiture.
Le policier qui était au niveau du pare-brise tire, le pied de Nahel a alors enfoncé l’accélérateur. “Je l’ai vu agoniser, il tremblait. On a percuté une barrière. »
Les policiers ont immédiatement réalisé un faux P.V. et accusé Nahel de « délit de fuite », de « conduite dangereuse » et de « tentative d’homicide involontaire » de façon à mettre les policiers en situation de légitime défense et fabriquer les premiers éléments d’impunité. En prétendant que Nahel leur aurait foncé dessus, commettant ainsi une tentative imaginaire d’homicide contre les policiers, ce premier faux en écriture visait en réalité à transformer un homicide volontaire en une réaction de légitime défense tout en inversant l’ordre des responsabilités.
Sur cette base, le procureur de la République de Nanterre a, dans un premier temps, ouvert une instruction pour tentative d’homicide de policiers contre Nahel.
C’est alors qu’une première vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, une seconde vidéo puis le témoignage d’un des amis de Nahel présent à l’avant de la voiture sont venus faire dérailler la machine à produire l’impunité.
Des millions de personnes ont soudainement vu ce qui d’habitude est soustrait au regard.
Ce qui fait événement dans cette l’affaire et qui explique la circulation extrêmement rapide des affects, de l’identification et des actes de colères partout en France mais aussi en Belgique, ce n’est pas tant la vidéo en tant que telle qui ne constitue jamais sur le plan de la vérité judiciaire une preuve-en-soi mais bien ce que cette vidéo, par contraste, révèle des techniques de construction de l’impunité policière :
- faux P.V.,
- diffamations et calomnies des victimes dans la presse,
- coalition de fonctionnaires,
- reprise et traduction des faux P.V. par le Parquet,
- tentative de poursuites des victimes par ce dernier dès les premières heures, etc.
Ce qui fait les reprises et les traductions auxquelles nous assistons depuis, c’est le contraste de tout ce qu’on ne voit pas sur la vidéo et qui éclate pour une fois en pleine lumière grâce aux actes juridiques des avocats. Ce sont ces souvenirs qui d’habitude n’appartiennent qu’aux victimes des violences policières meurtrières racistes, à leurs proches et à leurs sœurs et frères de conditions qui sont ainsi, pour une fois, rendus perceptibles au grand jour par le plus grand nombre.
Combien d’autres Nahel dont le meurtre a été effacé par la machine à produire de l’impunité ?
En Belgique, depuis que le CD&V a re-pris en main le Ministère de l’Intérieur le 9 décembre 2018, entre 65 et 94 personnes (d’après un premier recensement non exhaustif et limité) avec ou sans-papiers sont mortes entre les mains de la police.
Les noms de Mawda, de Dieumerci Kanda, de Lamine Bangoura, de Ibrahima Barrie, de Mehdi Bouda, de Adil Charrot, de Ilyes Abbedou, de Mohamed Amine Berkane, de Akram, de Mounir, de Ouassim et de Sabrina, de Sourour Abouda, de Isaac Tshitenda, de Imed, etc. persistent aujourd’hui malgré les tentatives d’effacement grâce aux combats pour la justice menés par les familles de victimes des crimes policiers racistes.
Lorsque le premier ministre Alexander De Croo (Open VLD) affirme que « la situation en Belgique n’a rien à voir avec la France », lorsque la ministre de l’intérieur, Annelies Verlinden (CD&V) affirme qu’il n’y a pas lieu de faire un audit de la garde zonale à Bruxelles malgré le nombre de morts qui ont eu lieu dans ces cellules et les révélations faites dans la presse sur l’ambiance raciste qui y règne (Le Soir, Sente, 21/01/23), on comprend l’ampleur et la profondeur du déni qui pèse sur la question du racisme et des violences policières en Belgique.
Déni armé si on s’en tient à l’ampleur du dispositif policier répressif préventif déployé par Philippe Close (PS) depuis le jeudi 29 juin pour empêcher tout rassemblement au centre-ville. Or que ce soit sur le plan du nombre de personnes tuées par la police relativement à la population, sur le plan de l’impunité des crimes policiers racistes ou sur l’entretien d’un déni armé, la situation en Belgique est encore pire qu’elle ne l’est en France.
C’est la raison pour laquelle tout est fait pour éteindre préventivement un mouvement de masse comme nous l’avons connu le 7 juin 2020 où plusieurs dizaines de milliers de personnes, en grande majorité des jeunes, étaient venus se rassembler devant le Palais de justice à l’appel de Black Lives Matter pour exiger la fin de l’impunité pour les crimes policiers racistes. Moment de masse, inédit, historique et vite recouvert par la dynamique éducationnelle de la société civile d’État et l’encommissionnement des luttes décoloniales.
Récemment un rapport administratif signé par 18 policiers rapporte que le policier qui a tué Adil en le percutant mortellement lors d’une course poursuite Quai de l’Industrie à Anderlecht le 10 avril 2020 s’est vanté à de multiples reprises de ce meurtre (“J’en ai sorti un de la rue”) instruisant ainsi à la fois un aveu du crime et une incitation au meurtre raciste (RTBF, 17 mai 2023).
Le policier n’a jamais été sanctionné, au contraire il a été promu et n’est même pas inculpé, ce qui fait craindre un grand risque de non lieu…
Le fait est suffisamment rare pour être soulevé : ici ce n’est pas une vidéo ou un témoignage extérieur mais bien le témoignage de 18 policiers qui vient contredire la version du policier impliqué dans la mort de Adil, celle du Parquet et du Juge d’instruction. C’est donc l’entièreté de la section qui témoigne contre ce policier. La Zone midi donc également le collège de police dont font partie les bourgmestres de la zone est pourtant au courant de ces faits graves depuis l’été 2022 par des mails envoyés par plusieurs membres du GIG3.
Le bourgmestre d’Anderlecht a été contacté en personne en février par une inspectrice principale de la zone pour qu’il y ait une correctionnalisation des propos tenus par le policier qui a tué Adil mais aussi pour dénoncer le racisme inhérent dans la zone qui est couvert par le chef de corps, Jurgen De Landsheer, lui même (mail intitulé “harcèlement sur le lieu de travail / demande d’intervention”, publié par Fabrice Cumps lui-même sur son mur FB le 21 juin 2023).
La policière en question a encore subi des représailles depuis la publication dans la presse du rapport administratif (nouveau mail envoyé au bourgmestre le 22 mai 2023). Pourtant, aucune mesure de protection n’a été prise par rapport aux 18 policiers lanceurs d’alerte.
Pire : l’enquête interne menée sous la responsabilité du chef de corps qui est lui-même à l’origine des tentatives d’étouffer les faits et de harcèlement sert aujourd’hui de chasse aux sorcières.
En outre, cette démarche de démantèlement des effets d’alerte du rapport vise à entraver et à détruire de l’intérieur, par la terreur, une pièce d’instruction. À cause de cette grave négligence des pouvoirs publics et ici singulièrement des bourgmestres (Cumps, Spinette et El Hamindine) qui n’ont jamais répondu aux demandes d’intervention de la part des policiers qui dénoncent un racisme endémique au sein de la zone, ceux-ci n’osent plus parler durant les auditions, ce qui pourrait affaiblir la force probante du rapport lui-même.
On voit ici comment les enquêtes internes menées par la police constituent indéniablement des entraves à l’indépendance de la justice.
Non seulement il n’y à aucune “importation des événements” français, parce que c’est bien depuis cette endogénéité des violences policières racistes que les jeunes et moins jeunes tentent de réagir depuis plusieurs jours, mais les prises de position du syndicat de la magistrature française ainsi que les actes juridiques pro-actifs des avocats de la famille de Nahel apportent un véritable cahier des charges pour attaquer l’impunité des crimes policiers racistes.
1 – La machine d’écriture policière à fabriquer l’impunité s’amorce immédiatement après les mises à mort par de faux P.V. qui auront force d’instruction et qui doivent être considérés comme des “faux en écriture publique”.
Les avocats peuvent et doivent agir de façon proactive par l’intermédiaire de plaintes tactiques, de façon à mordre sur la machine à produire l’impunité pendant qu’elle se fait plutôt que d’attendre dans une sorte de détachement kantien le grand moment pédagogique de la plaidoirie.
2 – Il faut rendre le dépaysement avec dessaisissement immédiat des parquets obligatoire de façon à briser le lien d’inter-dépendance parquet-police qui constitue un des maillages centraux de la fabrique de l’impunité.
Il faut également empêcher, par ce dépaysement automatique, que les polices locales, dont la culture de corps raciste est constitutive de l’omerta et du blanchiment, soient en charge d’éléments d’enquête dans le cas de crimes policiers, comme c’est actuellement le cas dans l’affaire du policier qui a tué Adil (ce flic a avoué ce crime et s’en est vanté).
En effet, les enquêtes internes servent à empêcher la correctionnalisation des faits de racisme à l’intérieur de la police. Pour le cas des éléments en cours relatif au policier qui a tué Adil, nous demandons que Jurgen De Landsheer soit écarté et que l’anonymat et la protection pour les lanceurs d’alerte soit garanti.
3 – Il faut construire l’externalisation des enquêtes sur la police via un organe réellement indépendant, non politisé et en mesure de correctionnaliser les délits instruits dans le cadre de ces enquêtes
Une politique communale pro-active visant à prendre appui sur les éléments d’instruction pénaux dans le cadre des enquêtes disciplinaires internes, comme commence à le faire la commune de Molenbeek, doit être généralisée et renforcée.
4 – Il faut encadrer beaucoup plus strictement l’usage des armes à feu lors des contrôles routiers et des courses poursuites
Qui sont aujourd’hui intégralement soumises à l’unique appréciation et à l’interprétation a posteriori des policiers.
Le “sentiment de se sentir agressé” (article 38 de la loi sur la fonction de police, articles 416 et 417 du Code pénal) laisse une marge d’interprétation tellement large qu’elle peut se constituer en permis de tuer.
5 – Il faut changer la politique de poursuite des crimes racistes en faisant du racisme un mobile en soi
À l’instar du féminicide, et pas juste une simple circonstance aggravante évaluée selon le principe de l’intentionnalité.
Cela nécessite une refonte en profondeur de la loi Moureau que contourne aujourd’hui avec une facilité glaçante les groupes suprématistes.
6 – Il faut faire démissionner de la fonction publique tous les policiers racistes et/ou apparentés à l’extrême droite
Le racisme est un délit grave qui doit être pénalement poursuivi d’autant plus activement pour les policiers qui, au nom de L’État, peuvent faire usage d’une arme à feu.
7 – Il faut organiser un contrôle démocratique de la police via une politisation des conseils de police par l’intervention et l’implication active des citoyens.
8 – Il faut mettre en place une commission d’enquête parlementaire instruite par des recherches universitaires et activistes sur les crimes policiers racistes ayant eu lieu en Belgique ces dernières décennies
Mais aussi par l’expertise des policiers qui ont tenté de dénoncer le racisme et le sexisme interne de façon à instruire une politique anti-raciste pragmatique et informée des cas de crimes racistes étouffés et blanchis souvent transformés en “accidents”…
- Affaire Nahel Merzouk
- Affaire Mawda Shawri
- Affaire Dieumerci Kanda
- Affaire Lamine Bangoura
- Affaire Ibrahima Barrie
- Affaire Mehdi Bouda
- Affaire Adil Charrot
- Affaire Ilyes Abbedou
- Affaire Mohamed Amine Berkane
- Affaire Abderrahmane Akram Kadri
- Affaire Mounir
- Affaire Ouassim Toumi et de Sabrina Elbakali
- Affaire Sourour Abouda
- Affaire Isaac Tshitenda
- Affaire Imed Haddaji

Le Parquet demande un non-lieu, la hiérarchie policière ferme les yeux...
Il y a deux semaines nous apprenions par presse interposée l’ignoble réalité qui se cache derrière « l’affaire Adil » du nom de ce jeune Bruxellois de 19 ans qui sur son scooter, percuté par un véhicule de police, a perdu la vie en avril 2020 à Anderlecht (Bruxelles). Trois policiers sont inculpés.
Le dossier à l’instruction devait être plaidé le 16 mai 2023 devant la chambre du Conseil (une chambre du tribunal de première instance composée en principe d’un juge unique et statue sur les réquisitions – à la demande- du ministère public, après avoir entendu le rapport du juge d’instruction.)
Il est éloquent ici de remarquer que depuis novembre 2020, le parquet demande un non-lieu pour les trois policiers inculpés ainsi que pour la zone de police (Bruxelles Midi) également poursuivie. Pourtant il s’agit ici des chefs d’inculpations suivants : l’homicide involontaire, la discrimination, la non-assistance à personne en danger et la coalition de fonctionnaires. Rien que cela fait froid dans le dos.
Par ailleurs de nouvelles révélations sur les policiers inculpés ont été faites et témoignent de ce qui se sait, ce qui se vit et ce qui se confirme donc. Oui, il existe dans le corps de police des éléments très dangereux et hors-la-loi et oui, la hiérarchie les couvre.
En effet une pièce a été ajoutée au dossier récemment et donne lieu au report de la plaidoirie au 5 septembre 2023. Il s’agit des déclarations d’une inspectrice de police entendue par la juge d’instruction ( en charge du dossier Adil) et, bien qu’il s’agisse d’un autre dossier, fait part de propos entendus par rapport à l’affaire Adil Charrot et au policier qui l’a percuté. Et elle explique :
« Les trois quarts de ses hommes sont venus me trouver pour me dire que l’intéressé tenait des propos pour le moins interpellant par rapport au décès du jeune Adil. Je précise que ce ne sont pas juste les hommes de son équipe, mais une grande partie des policiers du commissariat qui font état de ces propos ».
Et encore :
« L’inspecteur principal a tenu des propos racistes par rapport au jeune Adil. Il m’est également revenu de ses hommes que ce dernier se vantait d’en avoir sorti un de la rue par rapport à la mort du jeune Adil. Il se serait également vanté d’avoir déjà tué ».
Interpellant que, s’agissant d’un membre de la police qui se comporte ainsi, le Parquet (ou ministère public, réunit les magistrats qui représentent la société et en défendent les intérêts, veille à l’application de la loi par les cours et tribunaux, par exemple en demandant aux tribunaux, au nom de la société, d’appliquer la législation pénale) requiert le non-lieu. Mais pourrait-on dire, le parquet n’est pas au courant ? Rappelons qu’un.e juge d’instruction a pour mission d’instruire, donc de s’informer (iel recherche la vérité et doit examiner tant les éléments favorables au suspect que les éléments qui lui sont défavorables, iel enquête « à charge » et « à décharge »).
En conséquence que doit-on alors envisager lorsqu’on sait qu’encore plus grave, il existait un rapport administratif que plusieurs collègues avaient adressé au directeur opérationnel de la Zone Police Midi ainsi qu’au chef de corps Jurgen De Landsheer ?
Dans ce rapport de graves accusations quant au comportement du policier qui a percuté Adil sont dénoncées.
« Nous mettons en avant le fait que l’inspecteur principal se montre dégradant et démotivant à l’encontre de nouveaux collègues débutant leur carrière au sein de notre zone de police. Ces derniers se sentent écrasés, évincés et sans aucune utilité depuis leur arrivée au sein de notre équipe, et ce, à cause de la pression qu’effectue le policier : menaces de note de fonctionnement non justifiées, menace de déplacement dans une autre équipe et/ou service ».
Il est ajouté d’ailleurs que les policiers ayant saisi leur hiérarchie dénoncent également « des faits plus graves et pouvant faire l’objet de poursuites judiciaires » tels que :
« L’inspecteur principal fait preuve et a fait preuve à plusieurs reprises de comportements xénophobes, racistes et sexistes à l’encontre des membres de son équipe. Plusieurs remarques ou insultes racistes ont été proférées à l’encontre d’inspecteurs de police d’origine étrangère. Nous citons, et veuillez nous en excuser, des termes comme bougnoul, bouns, vous enculez des chèvres dans vos pays d’origine, je ne comprends pas que vous ne mangiez pas de porc ».
Alors, que pouvons-nous en tirer comme enseignement ?
- Que ce qui est dénoncé dans un très grand nombre de cas, c’est-à-dire la non poursuite donnée aux plaintes à l’encontre de policières-ciers et ou les classements sans suite (94% des plaintes introduites auprès du Comité P sont sans suite selon le rapport 2021) sont bien réels et non spéculée.
- Qu’il existe non seulement une loi du silence mais pire, une systématisation de la couverture de tels faits par les hiérarchies en charge de contrôle? C’est ainsi que le commissaire qui chapeaute l’ensemble des services d’intervention de la Zone de Police Midi « (…) était au courant de la situation et a cautionné le comportement de l’inspecteur de police durant toute la durée de sa fonction au sein de notre unité ».
Jurgen De Landsheer, le chef de zone déclare :
« Dès que nous avons été avertis à l’automne 2022, nous avons convoqué l’intéressé pour le recadrer. Il a été déplacé en février 2023 dans un autre service et n’a plus posé de problème depuis. Il n’a jamais fait l’objet d’aucune poursuite pour fait de racisme ou pour harcèlement. Alors oui, c’est quelqu’un que l’on peut qualifier de lourd, un beauf comme on dit dans le jargon, mais c’est un excellent policier qui a même été récemment promu ».
Ça aussi, ça fait froid dans le dos ! Peut-être qu’il s’agit d’un fonctionnement bien établi qui arrange les autorités ?
Cette situation se retrouve également à l’étranger, notamment en Allemagne. Une récente étude pour laquelle 3 300 personnes concernées ont été interrogées, ainsi que 60 policiers, juges, avocats et représentant.es de centres d’aide aux victimes a été menée par une équipe de chercheuses.eurs qui a étudié le phénomène de la violence policière en Allemagne.
« Il faut davantage de services d’enquête et de plainte indépendants« , déclare la co-auteure de l’étude et criminologue Laila Abdul-Rahman car la plupart des cas n’aboutissent pas devant les tribunaux.
« Nous avons été surpris de constater à quel point les chances de succès et le pouvoir de plainte auprès des personnes concernées par la violence excessive de la police sont faibles. Nous savions déjà à l’avance que plus de 90 % des procédures seraient classées sans suite par les parquets. Mais que la plupart des avocats déconseillent également de porter plainte contre des policiers, car les chances de succès sont si faibles et qu’il existe par exemple le risque d’être soi-même dénoncé : Ce problème structurel massif nous a surpris lors de l’évaluation de l’étude. De nombreuses personnes concernées perdent leur confiance en l’État de droit.«
Ce qui suit est également très interpellant vu que la situation en Belgique est fort similaire dans de nombreux cas qui nous sont rapportés.
« Tout d’abord, les preuves sont très difficiles à réunir, car il n’y a souvent que le témoignage de la personne concernée. C’est donc parole contre parole. Il n’y a souvent pas d’autres témoins – et les policiers sont au moins deux. De plus, il est très rare qu’un policier témoigne contre un autre, car les collègues sont très réticents à le faire. Un autre aspect est la crédibilité dont jouissent généralement les fonctionnaires devant les tribunaux. C’est compréhensible, car les deux institutions travaillent souvent ensemble et dépendent l’une de l’autre. Cela ne pose pas de problème dans la plupart des autres procédures. Mais bien dans les procédures contre des fonctionnaires de police pour violence excessive, on croit en principe davantage les déclarations des fonctionnaires que celles d’une personne concernée, cela pose un problème du point de vue de l’État de droit.
Loin de nous rassurer sur le rôle des forces de l’ordre dans notre société et de la manière dont leur fonctions sont parfois remplies les faits révélés ici ne peuvent qu’inciter à ce que la problématique soit traitée de manière ferme et sans délai.
- 2023.05.17_rtbf.be_Deces.D.Adil.A.Anderlecht.Le.Policier.Qui.A.Percute.Le.Jeune.Homme.Accuse.De.Racisme.Par.Plusieurs.Collegues.pdf
- 2023.05.27_Web.de_Kriminologin.Viele.Rechtanwalte.Raten.Von.Anzeigen.Gegen.Die.Polizei.Ab.pdf
- 09.05.2023 – Le rapport annuel 2021 du Comité P est sorti !
- 2021_ComiteP_Rapport.Annuel_FR.pdf
- Affaire Adil Charrot
- Étiquettes Adil C.
09.05.2023 – Le rapport annuel 2021 du Comité P est sorti !
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 09/05/2023

Il est composé de 2 parties : le rapport d’activités, qui traite du fonctionnement du Comité P, et le rapport d’observatoire qui reprend les constatations quant au fonctionnement des services de police et d’inspection.
Rapport d’observatoire
Le Comité permanent P met en évidence 4 thématiques censées refléter l’esprit du temps, liées à des sensibilités particulières ou à des faits qui apparaissent souvent dans les plaintes :
- les violences policières,
- le racisme et les discriminations,
- le refus d’acter
- les atteintes aux libertés individuelles lors de la gestion des manifestations.
En 2021 le Comité permanent P a ouvert 2793 dossiers de plainte
Soit 10,25 % de moins qu’en 2020). Le nombre de dossiers de plainte en 2021 s’est en quelque sorte normalisé à nouveau et revient à des chiffres similaires aux années antérieures à 2020.
En ce qui concerne le nombre de plaintes par corps de police (la Belgique est composée au 01.01.2019 de 185 Corps de police locale; parmi les zones de police, certaines couvrent le territoire d’une seule ville ou commune – zones mono-communales – et d’autres couvrent plusieurs villes et/ou communes – zones pluri-communales), les grands corps constituent de nouveau le top 10 en 2021. Il y a aussi les plaintes visant les fonctionnaires de police. Les policiers qui sont fréquemment en contact avec le grand public sont plus souvent mentionnés dans les plaintes. La plupart des plaintes concernent :
- les fonctionnalités de police de base intervention (29,4 %),
- l’accueil (14,4 %)
- la circulation (12,8 %).
À savoir que toutes les plaintes ne font pas l’objet d’une enquête plus approfondie. Ainsi, les plaintes qui ne concernent pas le fonctionnement des services de police, les plaintes manifestement non fondées et les plaintes déjà traitées par un autre service ne sont pas traitées par le Comité permanent P.
Les faits pénaux commis par des policiers sont transmis pour suite d’enquête aux autorités judiciaires compétentes
Les autorités judiciaires sont seules compétentes en la matière : Procureur du Roi, juge d’instruction, Auditeur du travail; les plaintes sont transmises à l’instance la mieux placée pour les traiter.
En 2021, une partie des dossiers de plainte a donc été confiée :
- aux services de police : 22,7 % pour traitement autonome au service de police (la décision finale incombe au chef de corps)
- au service de contrôle d’un service de police : 26,2 % pour enquête (les actes d’enquête sont posés par le service de contrôle interne de la police mais la décision est prise par le Comité permanent P).
- seuls 6,3 % des dossiers a été confié au Service d’enquêtes P.
Ceci met en évidence un fait souvent relevé :
Ce sont les services de police qui enquêtent sur … les faits pénaux commis par des policiers dans la majorité des cas.
Objet des plaintes
La grande majorité des plaintes concerne des manquements relatifs à l’exécution des tâches et à l’utilisation des compétences (91 %) ou des manquements concernant l’attitude des policiers (80,2 %).
Il est question de manquements relatifs à l’exécution des tâches et à l’utilisation des compétences lorsque le plaignant dénonce la non-exécution ou la mauvaise exécution des tâches par la police, ces deux catégories représentent la moitié des plaintes, ou le fait que la police a outrepassé ou détourné ses compétences, ce qui est le cas d’environ 1 plainte sur 3.
Les faits dénoncés à cet égard sont constamment y compris en 2021 :
- le refus d’acter,
- ne pas se rendre sur place,
- la mauvaise exécution des tâches
- l’usage de la contrainte ou de la violence.
Les manquements concernant l’attitude sont généralement liés au comportement non verbal (43,6 %) et verbal (30,6 %) des policiers.
Dans 1 plainte sur 10, les plaignants ont également dénoncé un langage agressif, menaçant ou intimidant.
En 2021, le Comité permanent P a clôturé 1305 dossiers de plainte.
Principaux motifs de clôture de dossier en 2021 :
- Hors sphère de compétence du Comité P (3,2 %)
- Transmis ou déjà traité par les autorités judiciaires (7,9 %)
- Pas établi à suffisance (6,0 %)
- Mesures d’ordre prises par les corps de police (13 %)
- Dysfonctionnement (9,6 %)
- Absence de dysfonctionnement (72,3 %)
Un dysfonctionnement individuel et/ou organisationnel a été constaté pour 143 plaintes.
1 dossier sur 10 portait sur le non-respect des principes de légalité, de proportionnalité ou de subsidiarité lors de l’usage de la contrainte.
Le Service d’enquêtes P mène des enquêtes judiciaires, pour le compte du ministère public ou du juge d’instruction.
En 2021, 72 nouvelles enquêtes judiciaires ont été ouvertes
Par enquête judiciaire, plusieurs faits pénaux sont examinés. Les faits pénaux qui apparaissent le plus souvent en 2021 sont :
- coups et blessures volontaires,
- aux commis par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions
- violation du secret professionnel.
Il peut être intéressant de se pencher sur les enquêtes judiciaires que le Comité P a ouvert à charge de fonctionnaires de police.
Le nombre en 2021 (« article 14, alinéa 2 – ouverture ») communiquées au Comité P par Parquet :
Parquet Anvers Gand Bruxelles dont Hal-Vilvorde Brabant wallon Mons dont Parquet Charleroi Liège TOTAL | 162 86 414 8 11 26 154 97 16 877 |
Observons aussi le nombre de décisions de classement sans suite prises dans ces enquêtes communiquées au Comité P par Parquet :
Parquet | Enquêtes judiciaires ouvertes à charge de fonctionnaires de police en 2021 | Classement sans suite prises dans les enquêtes judiciaires |
Anvers | 162 | 165 |
Gand | 86 | 71 |
Bruxelles | 414 | 413 |
Hal-Vilvorde | 8 | 5 |
Louvain | 11 | 11 |
Brabant wallon | 26 | 27 |
Mons | 154 | 186 |
dont Charleroi | 97 | 113 |
Liège | 16 | 11 |
Total | 877 | 846 |
SOIT plus de 96% des enquêtes judiciaires ouvertes à charge de fonctionnaires de police en 2021 ont été classées sans suite…
20.04.2023 – Printemps tragique : déjà quatre morts en un peu plus d’un mois !
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 20/04/2023

En Belgique sur un laps de temps de 35 jours, quatre personnes ont été abattues par des policiers qui ont fait usage de leur arme à feu contre des civils.
Le 2 mars 2023 à Waret-l’Evêque
Loïc blesse au visage et à la jambe un policier qui intervient à son domicile à la demande de sa mère. Sous réserve de l’enquête, il semble que Loïc, 27 ans, ait été abattu par un policier. Le jeune homme souffrant de problèmes psychologiques était reclus dans la cave de la maison familiale et se serait emparé d’un couteau. En riposte, un policier tire. Le jeune homme serait mort seul, réfugié dans la cave du domicile familial.
Une voisine estime que le policier aurait pu tirer dans les jambes, qu’on ne met pas fin comme cela à la vie d’un jeune homme. Estimant qu’il y avait d’autres réactions possibles, les parents du jeune homme ont annoncé leur intention de déposer plainte contre le policier auteur du tir.
L’usage des armes à feu par la police est très clairement précisé dans la loi, aurait-il été abusif ?
L’usage de l’arme de service est considéré comme étant une mesure de contrainte policière à laquelle les policiers peuvent recourir dans les limites des principes généraux de :
- la légalité et la légitimité, à savoir respecter la loi et poursuivre un objectif juste ;
- la subsidiarité, c’est-à-dire envisager si le but visé ne peut pas être atteint d’une manière moins contraignante (ex : la négociation) ;
- la proportionnalité ou de l’équilibre entre la force utilisée et la résistance opposée.
- l’avertissement préalable : tout recours à la force doit être, dans la mesure du possible, précédé d’un avertissement pour autant que celui-ci ne rende pas le recours à la force inopérant. Ainsi, la personne avertie aura encore la possibilité d’éviter d’être contrainte en s’exécutant ou en adoptant le comportement attendu.
Le 21 mars 2023 à Uccle (Bruxelles)
À l’Institut psychiatrique Fond’Roy un patient décrit comme agressif, âgé de 49 ans, portant une arme blanche a été tué. La police avait été appelée par le personnel de l’établissement, parce qu’il n’arrivait pas à le gérer. Le policier se serait senti menacé par le patient.
S’il est évident que la la violence en psychiatrie est un problème majeur pour le patient tout comme pour le personnel il est interpellant qu’il faille faire appel aux forces de l’ordre non préparées ni formées dans le cadre des recommandations internationales existantes.
Tirer sur un malade et le tuer, est-ce donc l’unique solution ?
« Pendant le déroulement des opérations, les policiers intervenants ont été amenés à utiliser leur arme de service » […] « Une aide psychologique a été proposée aux policiers, sous le choc de ces événements« , relate le parquet.
Le 23 mars 2023 à Seneffe
Imed, 42 ans, père de deux enfants, a lui aussi été tué par la police après une course-poursuite à Seneffe. Il aurait été poursuivi par les forces de l’ordre depuis Nivelles.
Il roulait à toute vitesse et, ne sachant l’arrêter, les policiers ont ouvert le feu pour le neutraliser!
Des proches d’Imed sont retournés à l’endroit où il a été tué. Pour eux, il a fait les frais d’un acharnement policier. Ils ont constaté la présence de 5 impacts de balles sur le véhicule ! Pour Ouafah, la sœur d’Imed,les membres des services d’ordre ont fait preuve d’acharnement…
Le 3 avril 2023 à Gouvy
La police a abattu Jacky, un homme de 40 ans apparemment alcoolisé et au comportement agressif dans un camping.
Le drame s’est déroulé en début de soirée, la victime était en visite chez sa mère qui réside dans le camping. En état d’ébriété il aurait troublé l’ordre public. La police locale a été appelée sur place. À l’arrivée des policiers, Jacky a exhibé des couteaux et s’est montré menaçant. Un des policiers a alors ouvert le feu. L’homme est décédé des suites de ses blessures. Le Procureur du Roi a confirmé ces faits sans faire davantage de commentaires.
Alors ?
- Dans chacun des cas, les sommations d’usage ont-elles été faites ?
- Était-il nécessaire de tirer pour tuer ? Les policiers ne pouvaient-ils pas viser pour neutraliser, tirer dans les jambes par exemple ?
- Pourquoi autant de coups de feu à chaque fois ?
- Verra-t-on police et justice faire bloc comme souvent ?
- Des témoins, des images vont-ils faire surface ?
- Les policiers se sentent-ils si menacés qu’un couteau suffit à déclencher un shoot-to-kill ? Quelles conclusions en tirer sur leur formation,la gestion du stress et la désescalade ?
- Le degré de violences de la police en France sans précédent depuis les Gilets jaunes (et les rares condamnations de flics violents) a-t-il une influence
- Et surtout : en cautionnant l’usage des armes dans ce genre de contexte (cul-de-sac pour Imed, hôpital psychiatrique pour le patient), ne risque-t-on pas d’encourager les policiers à défourailler ?
- Étiquettes Loïc Vanderroost
04.04.2023 – Violences policières : un outil de répression du gouvernement français
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 07/04/2023

Impossible de passer sous silence les violences policières illégitimes et illégales outrepassant l'entendement, qui se déroulent depuis plusieurs semaines en France.
Beaucoup a été dit et écrit au sujet d’une réforme des retraites passée par la force de l’article 49.3 désormais bien connu, qui a déclenché un réel soulèvement populaire dans les rues de France.
S’est ajoutée aux nombreuses manifestations, aux rassemblements spontanés ou non, la colère en contestation de la construction d’une mégabassine à Sainte-Soline. Ce sont donc des dizaines, voire des centaines de milliers de personnes (plus de 2,5 millions le seul 11 février selon le chiffre des syndicats, 963.000 selon le ministère de l’Intérieur) qui se sont retrouvées dans les rues ou dans les champs face à des milliers de policiers envoyés par le gouvernement pour « maintenir l’ordre« .
Une très large couverture médiatique en direct lors de ces manifestations que ce soit à Paris ou dans de nombreuses autres villes françaises, Nantes, Toulouse, Bordeaux ou Sainte-Soline, ne laisse aucun doute sur les agissements des forces de l’ordre qui sont sidérants. Ici une personnes isolée par les policiers qui se fait tabasser à terre, là un groupe de manifestant.e.s qui se voit chargé violemment à coups de matraque même sur le visage ou la tête, plus loin encore des arrestations massives.
Le droit de manifester est ainsi bridé par la force et la peur, les hordes de policiers qui se ruent lourdement armés et bien protégés sous leurs carapace font régner la terreur. De très nombreuses plaintes pour arrestations abusives ont aussi été dénombrées.
Ce qui trouble particulièrement ce sont les agissements sans retenue pratiquée par ces membres des forces de l’ordre. Un des dispositifs a été particulièrement dénoncé, il s’agit des BRAV-M (pour « brigades de répression de l’action violente motorisées« . Assez interpellant de voir qu’il s’agit de brigades de répression « de l’action violente« , alors que ses membres ont été parmi les plus violents. Insultes, menaces et coups infligés par ces policiers à moto sont nombreux.
Grâce à l’enregistrement de propos tenus au cours de l’interpellation de plusieurs manifestant.e.s nous avons eu la possibilité d’entendre entre autres de la bouche de certains policiers « Je peux te dire qu’on en a cassé, des coudes et des gueules » ou encore « La prochaine fois, tu montes en ambulance« . Lors de l’interpellation de ces 7 jeunes (sans qu’il soit permis d’établir, pour le moment, leur participation aux incidents) les menaces et intimidations ont été ignobles ; un jeune homme a été de plus été frappé à deux reprises. Cela en dit long sur le sentiment de surpuissance de ces policiers ainsi que leur manque total de correction la plus élémentaire, le tout couronné de racisme.
Au rassemblement autour de la mégabassine de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) on dénombre pas moins de 200 blessés chez les participants (47 chez les gendarmes) dont le 1er avril dernier un manifestant de 32 ans était entre la vie et la mort, un autre à peine sorti du coma.
Quatre ans après les « Gilets jaunes », huit ans et demi après la mort de Rémi Fraisse, tué dans l’explosion d’une grenade tirée par un gendarme lors d’affrontements contre la mise en place d’un barrage à Sivens (Tarn) le débat autour de la violence policière est ainsi relancé de plus belle.
Michel Forst, rapporteur spécial des Nations unies sur les défenseurs de l’environnement et anciennement sur les défenseurs des droits de l’homme, juge lui aussi la situation en France « préoccupante ».
Il est indéniable qu’il y a une inquiétude de plus en plus partagée sur la manière dont la force est utilisée en France dans la gestion des manifestations. La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a pointé des débordements « un usage excessif de la force » et rappelé que les libertés d’expression et de réunion doivent être protégées contre toute forme de violence.
D’ailleurs si les personnes en France n’osent plus se rendre aux manifestations, c’est par « peur » de la police et non des activistes (Michel Forst).
Pour Frédéric Maillard, analyste des pratiques policières et des organisations de police, il est grand temps que l’Hexagone remette en question son approche de la gestion des foules et la réforme.
À la date du 2 avril 2023 en une semaine pas moins de 38 enquêtes IGPN et IGGN ont été ouvertes depuis le début de la mobilisation sur les retraites.
Les familles des deux manifestants blessés à Sainte-Soline, Mickaël et Serge, âgés de 34 et 32 ans, ont déposé plainte notamment pour « tentative de meurtre »
- Le Monde, 01.04.2023
- Courrier international
- Le HuffPost avec AFP
- ObsPol
- Étiquettes France
17.01.2023 – Les réactions s’enchaînent à la suite d’un troisième décès dans un commissariat…
- Auteur de l’article Par adminObs
- Date de l’article 17/01/2023

Ce dimanche 15 janvier, les collègues de Sourour ont organisé un rassemblement et invité tous ceux et celles qui appréciaient la victime à venir lui rendre hommage devant le lieu du décès. Plus d’une centaine de personnes sont venues. Vive émotion et profonde incompréhension parmi les proches, qui appellent à rester mobilisé·es pour de prochains évènements, à suivre sur la page FB de l’asbl PAC.
Sarah de Liamchine, présidente de l’association PAC (présence et actions culturelles) où travaillait Sourour :
« C’est un traumatisme important pour le PAC, d’autant que nous sommes souvent mobilisés dans des dossiers liés aux violences et à la police. C’est déjà très compliqué quand il s’agit de cas concernant des inconnus, mais quand il s’agit d’une collègue, c’est un traumatisme. Une cellule d’écoute et d’aide psychologique a été mise en place au sein de l’association. Certains collègues ont, aujourd’hui, peur d’être interpellés par la police, surtout s’ils sont d’origine étrangère. Il faut se poser des questions à ce propos. Ce n’est pas normal que la police suscite la peur alors qu’elle est là pour aider et protéger. Sourour aurait dû être protégée, mais cette mission n’a pas été remplie par la police. C’est le troisième décès d’une personne d’origine maghrébine dans cette cellule. Quand ça arrive une fois, on peut croire à un incident. Quand cela arrive trois fois, ce sont des dysfonctionnements. Sourour n’est pas un simple fait divers, ce n’est pas un cas, c’est une personne. Morte trop tôt. Pour le moment, nous essayons d’être surtout là pour le fils de Sourour, qui n’a plus de parents. C’est un jeune meurtri, mais il reste digne. Ce qu’il souhaite aujourd’hui, c’est comprendre ce qui est arrivé à sa maman. »
L’ambassade de Tunisie à Bruxelles a publié le 17 janvier un communiqué :
« L’ambassade porte à la connaissance des ressortissants tunisiens en Belgique, que tout le nécessaire est entrepris, en coordination avec le Consulat de Tunisie à Bruxelles et les auorités belges, ainsi qu’avec la famille de la défunte, pour connaîter les circonstances exactes de la mort, dans un centre de détention de la police de Bruxelles, d’une ressortissante tunisienne, survenue jeudi 12 janvier 2023. »
Bruno Bauwens, conseiller communal PTB :
Nous exigeons, tant au niveau communal qu’au niveau fédéral, qu’un audit de la part du Comité P soit réalisé pour ce commissariat. La demande est faite au sein du conseil communal, mais elle sera également faite en commission Intérieur de la Chambre, au niveau fédéral. Nous voulons également joindre la Ligue des Droits Humains et l’Institut fédéral des droits humains à cet audit. C’est le troisième décès suspect dans cet établissement policier, c’est inacceptable. Nous voulons que toute la vérité soit entendue à propos de cette mort, et ne pas rester avec des questions sans réponses comme c’est le cas pour les décès précédents. »
Le bourgmestre Philippe Close (PS), interrogé en séance du conseil a indiqué que chaque année 9000 personnes faisant l’objet d’une arrestation administrative ou judiciaire connaissent le même centre de détention de la police locale situé à la « Cité administrative », entre le dispatching de la police fédérale et les locaux de la police de zone. Un audit du commissariat serait souhaitable selon lui. Le bourgmestre a encore précisé qu’à la suite des deux décès précédents, une procédure de passage toutes les heures en journée et toutes les deux heures la nuit a été mise en place au centre de détention.
C’est effectivement la 3ème fois en deux ans qu’on découvre un cadavre dans une cellule du RAC, sous la responsabilité de la police locale bruxelloise :
- Le 19 janvier 2021, Ilyes Abbedou, sans-papier algérien de 29 ans, est arrêté pour le vol présumé d’une veste. Placé en cellule le soir à la rue Royale, on le retrouve mort le lendemain après-midi. Autopsie : mort plus de 9 heures avant que la police ne le constate officiellement. Quid des caméras de surveillance censées être contrôlées en permanence pour que l’alerte puisse être donnée au moindre souci ? Le médecin légiste affirme qu’aucune trace de violence n’a été décelée et que la mort est intervenue sans intervention d’un tiers. À ce jour, aucune explication.
- Le 13 décembre 2021, Mohamed Amine Berkane , un autre sans-papier algérien de 26 ans, est arrêté place de la Bourse pour le vol présumé d’un GSM et amené dans le même bâtiment du RAC. Un médecin l’examine avant qu’il soit écroué et délivre un « Vu et soigné ». Mort annoncée le lendemain vers 15:00, après intervention du SMUR. Autopsie : pas d’intervention d’un tiers dans le décès.
- Le 12 janvier 2023, c’est au tour de Sourour, 46 ans et mère d’un jeune de 19 ans, arrêtée pour « trouble à l’ordre public » et encagée au RAC. Autopsie : pas d’intervention d’un tiers dans le décès. Cause du décès ? Suicide par pull interposé…
Les trois dossiers font toujours l’objet d’enquêtes judiciaires. Jusqu’à la prochaine découverte macabre ? À ObsPol, ce RAC produisait déjà des remugles nauséabonds, aux côtés d’autres commissariats bruxellois de sinistre (et maintes fois vérifiées) réputation. Mais alors que la plupart de ces commissariats ne doivent leur réputation qu’aux coups, insultes et brimades des flics et des geôliers, le RAC a une place plus détestable encore dans nos archives : 3 occurences, 3 morts…
Alors, attendra-t-on le décès suivant pour mener à bien l’ »audit » souhaité par le Bourgmestre ? Ne serait-il pas opportun d’étendre cet « audit » à tous les commissariats bruxellois ?
- Étiquettes Sorour Abouda